Abdel'alim Medjaoui

mercredi 28 janvier 2009

Ma réponse à lNITIATIVE.docxCe que je pense de l’initiative
"POUR DES ETATS GENERAUX DE LA GAUCHE DEMOCRATIQUE".
Cher ami,
Tu as pris sur toi de m’envoyer les textes de "l’initiative", estimant sans doute que je remplissais un minimum de conditions pour en être destinataire. En ce sens, tu as dû certainement prendre note, en plus de mon statut d’ancien dirigeant du parti, de ce que j’ai dit
« (…) Les meilleurs grands esprits dans le monde avaient salué la « grande lueur à l'Est » née avec Octobre et qui est devenue, depuis la Seconde Guerre mondiale, un élément d'équilibre planétaire venu brider les appétits prédateurs de l'impérialisme occidental, et donner un horizon à la lutte des peuples pour leur libération. C'est à son ombre, en particulier, qu'est né notre mouvement national moderne, et c'est son poids dans le rapport de force mondial qui a permis à notre lutte de libération de se développer et de vaincre. C'est son empreinte qui a contribué à la radicalité de ce mouvement et à y légitimer, malgré tout, un courant influencé par son idéologie, au nom de laquelle même nombre d'Européens d'Algérie ont donné leur vie pour l'indépendance. Comme beaucoup d'autres peuples, comme Cuba et le Viet-Nam, entre autres, c'est du côté de cette expérience qui a donné corps au "spectre" dont Marx disait qu'il hantait l'Europe, que mon peuple trouve l'inspiration et le soutien pour échapper au piège de la dépendance, de l'injustice et de la misère néocoloniales…
» Malgré les vicissitudes liées à l'échec colossal de cette expérience et à l'affaissement de l'URSS, ou peut-être justement à cause de ce retournement inouï, à cause de la restauration indécente, sans vergogne, d'un colonialisme plus triomphant que jamais, ne trouvant plus devant ses exigences insatiables que la seule pauvre lutte des peuples, et une opinion progressiste mondiale émiettée, j'estime que j'ai eu raison d'avoir pris cette option, et d'avoir soutenu, dans cette voie, les efforts et les acquis indéniables de mon peuple et de ses dirigeants non communistes. Et que si j'avais à refaire le choix, je n'hésiterais pas un seul instant, même en sachant le risque d'impasse. (…) »
Je ne pouvais être alors qu’une cible tout à fait conforme à l’objet de l’initiative, puisque, par cette profession de foi, je continue de m’inscrire comme un homme de gauche : je persiste à me dire du côté de mon peuple, et des autres peuples, en lutte pour une indépendance conséquente, réelle. Une lutte rendue plus complexe et plus dure, dans un monde, je le répète, plus que jamais livré à une prédation pour laquelle j’ai utilisé le terme de colonialisme, mais dont il faudrait renouveler la caractérisation : néocolonialisme, impérialisme, globalisme (ou quoi d’autre ?).
Cependant, je signale « l’échec colossal » de l’entreprise qui nous avait réunis dans le PAGS. C’est-à-dire que je dis ne plus avoir les critères reconnus, ici et là-bas, pour me permettre de savoir ce que je suis quand je dis « être de gauche", et par là je rejoins les remarques pertinentes de l’auteur de la contribution signée, je crois, A. Akika.
Voilà une intervention fraîche, agréable à lire, didactique, sans aucune crispation, ni langue de bois ! Et qui pourtant pose dans leur profondeur des problèmes importants et graves du devenir de notre « ancien » mouvement. Une intervention, je crois, à prendre très au sérieux dans l’effort que vous avez entrepris…
Elle met l’accent, en effet sur l’importance de ces critères et appelle à la nécessité de les reconceptualiser et les définir pour les nouvelles conditions de la lutte d’aujourd’hui. C’est une tâche d’autant plus ardue que nous avons perdu, avec la disparition du PAGS, la seule personnalité qu’on nous connaissait et reconnaissait, et que nous avions reconfirmée par le Congrès de 1990.
Ces critères reconnus, je me suis, pour ma part, efforcé dans mon livre de dire combien il nous a fallu de temps et d’attentions soutenues, aidés en cela par nos camarades soviétiques, pour que nous y répondions et fussions éligibles à prendre la place de l’ex-PCA, comme représentant de la classe ouvrière de notre pays, dans ce qui était le grand MCOI ! C’est ce cadre, le seul légal au plan de la reconnaissance internationale et aussi nationale – parce qu’il était le seul à présenter à notre opinion nationale un projet concret, qui nous avait conquis en tant que militants, celui bien en chair dans les pays socialistes ! –, c’est ce cadre donc, et ses acquis, que j’ai essayé de défendre dans mon livre.
Je me promettais et me promets toujours de donner une suite à mon livre, dans le sens que je me suis fixé en rendant compte de « mon histoire » du PAGS. Il est vrai que je n’ai plus la prétention ni la vigueur de mes jeunes années ; aujourd’hui, je suis à la retraite. Il est vrai aussi que j’attendais d’être encouragé par des réactions à mon écrit. Des réactions même très critiques, pourvu qu’elles ne se départissent pas du respect que je me sens en droit d’exiger pour le parcours qui a été le mien dans ce parti (sans parler de la période de la guerre de libération). Et du respect aussi pour l’effort que j’ai fourni en rendant clairement compte aux militants – et je suis le seul à l’avoir entrepris jusqu’ici ! – de ce que j’ai fait de la confiance qu’ils avaient placée en moi.
Et on m’en a promis des réactions ! On m’a dit de me « préparer au débat » sur les problèmes que j’ai soulevés dans mon livre ! En fait de débats, cher ami, tu as été le seul, parmi l’ancien encadrement du parti, à m’avoir dit que tu avais lu mon livre (ce qui m’a fait chaud au cœur), et que tu n’étais pas d’accord (là, j’attends d’en savoir plus).
J’en suis encore à me poser des questions sur cet ostracisme qui a frappé mon livre, sur ce silence assourdissant de mes anciens camarades par quoi ils ont accueilli de façon plus accusée que la sortie de mon premier livre celle de mon second. J’en suis encore à me demander le pourquoi de ces regards gênés et détournés pour ne pas rencontrer mon regard, sans compter ces propos insultants proférés dans mon dos – je peux dire heureusement venant de « camarades » qui ne connaissent rien de mon parcours et de mon engagement. Un de ces anciens amis, qui faisait office d’intellectuel respecté du parti, est même venu me dire, plusieurs mois après la sortie de mon livre : « il paraît que dans ton livre tu t’en prends à untel ». Comme s’il voulait voir confirmer par ma bouche les ragots qu’il s’est laissé susurrer à l’oreille ! Qu’est-ce qui l’a intimidé à ce point qu’il n’utilise pas ses capacités intellectuelles pour se rendre compte lui-même de ce qu’il y a dans mon livre concernant une partie importante de sa propre vie ?
Cher ami,
Ces comportements sont graves de conséquence. Je n’en parle pas seulement parce que je me sens blessé dans mon amour-propre. J’ai appris à connaître la fragilité de l’amitié basée sur des étroitesses idéologiques. J’en parle surtout parce que ce sont des alibis faciles pour ne pas aller au fond des choses.
Parce que concernant l’effondrement du grand PCUS et de ses organisations satellites, malgré leurs millions d’« encartés », si l’on avance comme cause de cette catastrophe les manigances et complots de la CIA et de ceux qu’on culpabilise comme étant ses marionnettes, des hommes d’État comme Eltsine ou Gorbatchev, alors qu’ils ont eu le courage sinon la témérité de dénoncer les tares qui bloquaient et avaient même pourri les bases du système socialiste mondial, si l’on endosse donc cette conduite, c’est que l’on ne veut pas aller au fond des choses. C’est la même entreprise rédhibitoire qui veut incriminer dans « l’implosion » du PAGS, notre Sécurité militaire nationale et les agents qu’elle aurait introduits dans la direction du parti. Une telle entreprise empêche également d’aller au fond des choses.
Et ce n’est pas bon pour l’initiative que vous avez lancée.
Bien amicalement, cher camarade, Abdelalim Medjaoui.

lundi 29 décembre 2008

Présentation de mon livre "Le Géant aux yeux bleus..."

Se reporter au site (Dz Lit) Abdel-Alim Medjaouihttp://dzlit.free.fr/ajlivre.php?aut=01234&idl=02593

Pésentation de mon livre Ce Pays est le nôtre

Présentation du livre "Ce Pays est le nôtre", par Belacem Rouache, in "Le Jeune Indépendant", in dz

mercredi 24 décembre 2008

Né à Tlemcen en 1935, 'Abdel`alim Medjaoui est de la génération des moudjahidine dont il a tracé le portrait dans un premier livre, "Ce Pays est le nôtre" (Casbah-Editions, Alger, 2000). Il revient dans "Le Géant aux yeux bleus. Novembre, où en est ta Victoire?" (Casbah-Editions, Alger, 2007) sur les années d'indépendance à la lumière critique et autocritique de son expérience de militant du socialisme, confronté de façon solidaire à ses anciens compagnons du combat libérateur. Il rejoint le Parti communistes algérien (PCA) en 1963 et a été un des animateurs du Parti de l'avant-garde socialiste (PAGS) jusqu'à son départ en retraite en 1993.

La nation selon G. Meynier

La haine est licite aussi bien que l'amour et je la ressens au plus haut point contre ceux qui ont du mépris.
Georg Büchner, Lettre à sa famille, février 1834.

Dans la conclusion de sa volumineuse Histoire intérieure du FLN[1], Gilbert Meynier affirme :
« À l’indépendance, la nationalité algérienne procéda automatiquement de la religion musulmane, et non de ce vouloir être ensemble par-delà les différences, de ce “plébiscite de chaque jour” qui signait, pour Renan, l’appartenance à cette communauté moderne imaginée qu’ordinairement, on dénomme vulgairement nation. »
Voyons ce qu’il y a de vrai et de juste dans cette allégation péremptoire.
Il faut croire que notre historien n’a que superficiellement lu le fameux discours de Renan et qu’il se suffit de ce petit morceau de phrase du grand penseur français avec quoi il croit pouvoir résumer la notion rénanienne de nation. Pour donner une plus juste idée des vues de Renan, il faut revenir à d’autres parties de son texte :
La nation, dit Renan, comme l’individu, est l’aboutissant d’un long passé* d’efforts, de sacrifices et de dévouements. Le culte des ancêtres est de tous le plus légitime*; les ancêtres nous ont faits ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j’entends de la véritable), voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale. Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble*, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple. On aime en proportion des sacrifices qu’on a consentis, des maux qu’on a soufferts. On aime la maison qu’on a bâtie et qu’on transmet*. Le chant spartiate : « Nous sommes ce que vous fûtes ; nous serons ce que vous êtes » est dans sa simplicité l’hymne abrégé de toute patrie.[2]
Renan étaie son idée en soulignant qu’une nation est cette
grande solidarité… (qui) suppose un passé*… un héritage de gloire et de regrets à partager* », bâti sur « le sentiment des sacrifices qu’on a faits et de ceux qu’on est disposé à faire encore (…) Avoir souffert, joui, espéré ensemble, voilà ce qui vaut mieux que des douanes communes et des frontières conformes aux idées stratégiques ; voilà ce que l’on comprend malgré les diversités de race et de langue. Je disais tout à l’heure : “avoir souffert ensemble” ; oui, la souffrance en commun unit plus que la joie. En fait de souvenirs nationaux, les deuils valent mieux que les triomphes, car ils imposent des devoirs, ils commandent l’effort en commun.
S’il avait bien lu ces développements, cette insistance sur l’histoire, G. Meynier n’aurait pas opposé vulgairement le passé, fût-il musulman, au désir de vivre ensemble. Il ne se serait pas épuisé à se poser des questions sur :
« les multiples significations possibles que le Fln (…) put donner à cette nation algérienne pour laquelle il disait coram populo vouloir lutter. » Ni sur « les acceptions suivantes sous forme de plusieurs questionnements :
1.- la nation du Fln se réduisit-elle à l’État ? (…),
2.- la nation du Fln, fut-ce la tradition résistante érigée en mythe fondateur ? Ou bien fut-ce
3.- la patrie ? Ou encore
4.- l’identité culturelle, et laquelle ?
5.- Fut-ce enfin la nation au sens qu’a donné à ce terme l’historiographie du 20e s. (…)? Ou bien encore,
6.- la nation du Fln resta-t-elle ancrée au milieu de cet emboîtement de poupées russes communautaires qui avait façonné jusque-là les identités, de la communauté de base – la tribu – à l’umma l-muhammadiyya (littéralement : communauté mahométane) de l’islam universel ? C’est sous ce rapport qu’a été étudiée
7.- la situation des Européens et des juifs d’Algérie dans les représentations et dans la pratique du Fln. (…), on expliquera pourquoi la manière dont furent envisagées les minorités par le Fln ne permit-elle pas qu’elles s’agglutinent finalement à la nation algérienne.»[3]
Nous nous excusons de cette longue citation, mais elle était nécessaire pour que le lecteur soit au fait des interrogations de G. Meynier concernant le concept de nation tel qu’il essaie de le lire dans l’œuvre du Fln.
Après s’être demandé si pour le Fln la nation se réduisit à l’État, il remet en cause lui-même cette vision restrictive en ajoutant tous les autres éléments qu’il pense lire dans cette « nation du Fln ». Mais son interrogation sur cette question de l’État n’est pas une hypothèse réductrice fortuite inconsidérément avancée puis corrigée, sinon niée, par les compléments qu’il lui fait suivre. Il en veut à la nation-État du Fln comme résultat prétendument « militarisé » d’une lutte indépendantiste aussi prétendument « militarisée ». Nous avons déjà dans une intervention précédente[4], montré que la lutte armée était la seule initiative susceptible d’arracher liberté et droits citoyens à un colonisateur plus que jamais fermé aux revendications de l’Algérien « indigène ». Et contrairement à ce que pense G. Meynier de cette initiative, elle n’est pas un simple retour « à la tradition résistante » mais une nationalisation de cette tradition par le mouvement national moderne.
C’est d’ailleurs ce qu’ont compris les autorités coloniales lorsqu’elles ont été surprises par le 1er Novembre, elles qui croyaient le mouvement national impuissant parce qu’en crise et profondément divisé : malgré la faiblesse du nombre et des moyens des insurgés, elles ont compris que cette fois-là ce n’était plus comme les insurrections d’avant, que cette dernière était réellement nationale. Elles ont été convaincues que si elles n’étouffaient pas dans l’œuf cette “armée de libération nationale” (Aln) avant qu’elle ne prenne corps, elles seront obligées de reconnaître cet “État démocratique et social”, restauré “dans le cadre des principes arabo-islamiques”... annoncé par la proclamation de 1er novembre 1954. Elles ne purent cependant empêcher la Soummam de consolider l’Aln et de préparer les conditions d’une résurgence de l’État algérien dont la création du gouvernement provisoire de la République algérienne (Gpra) fut une étape d’autant plus marquante qu’il voyait sa légitimité confortée par les puissantes manifestations populaires de décembre 1960…

Le fil de l’histoire active

Cet État allait permettre de renouer le fil de l’histoire active du peuple algérien interrompu par plus d’un siècle de colonisation, et la restauration-récupération de cet élément essentiel non retenu par G. Meynier de la définition de Renan : ces grandes choses faites ensemble, ce long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements, ce culte des ancêtres… de tous le plus légitime… sur quoi se base toute nation moderne.
Ce passé ne pouvait être celui des Gaulois, mais il plonge ses racines près d’un millénaire avant que ces derniers ne se signalent par une révolte à laquelle César va donner un retentissement à la mesure de l’honneur qu’il voulait s’acquérir de l’avoir réduite. Un millénaire durant lequel nos ancêtres numides, au contact direct avec la grande civilisation mésopotamienne acclimatée dans nos contrées, ont contribué, avec Carthage, à en diffuser les savoirs et les bienfaits jusqu’en Europe de l’époque… Au point que près d’un siècle avant la défaite gauloise d’Alésia, et près de sept siècles avant que n’émerge le premier État, celui de Clovis, auquel la nation française aujourd'hui se « raccroche », nos ancêtres constituaient le premier État numide dont Massinissa fit la prospérité économique et politique ; ce dont ont témoigné élogieusement les historiens gréco-latins qui, à la suite de Polybe, ont cherché à montrer pourquoi et comment les nations civilisées du monde d’alors sont tombées sous la domination de Rome…
De cette période de plus de cinq siècles de compagnonnage de nos ancêtres avec Rome, puis les Vandales, puis Byzance, l’histoire universelle a retenu les noms d’une kyrielle de Numides dirigeants politiques chevronnés et avisés tels que Jugurtha, dans l’opposition à la colonisation romaine, la dynastie des Sévère à la tête de la Rome impériale ; ceux de nombreux penseurs, écrivains, philosophes et hommes d’Église et du plus éminent d’entre eux, saint Augustin l’animateur de la vigoureuse Église d’Afrique, et la liste pourrait être encore longue…
Puis vinrent les Arabes, ce peuple généreux, ouvert, avec lequel notre peuple vivra une symbiose si étonnante et si parfaite qu’il va devenir lui-même, non seulement musulman en embrassant le message universaliste et humaniste qu’il lui apporte, mais aussi pleinement arabe, en développant de nouveau, comme jamais depuis Massinissa, sa personnalité amazighe. Cette liberté que le grand aguellid avait conquise sur Carthage, et que ses descendants ont défendue pied à pied contre la Rome prédatrice, s’est épanouie dans la nouvelle aire civilisationnelle : au cours du siècle suivant la conquête, nos ancêtres amazighs ont contribué à propager le message civilisateur jusque loin au nord ; puis au-delà de l’aide qu’ils ont apportée aux Omeyyades, chassés par les ‘Abbassides, pour se déployer en Andalousie, ils se sont impliqués, avec d’autres musulmans, Arabes et non-Arabes, dans les luttes – les plus arabes qui soient, opposant les familles des proches du Prophète –, qui concernaient une question civilisationnelle centrale, dont la solution, plus ou moins réussie, a déterminé les progrès et les échecs de l’arabo-islamisme.
Ces luttes ne portaient pas sur des questions de pur dogme religieux, mais sur la légitimité des dirigeants prétendant assumer l’héritage du Prophète, sur la pureté du message civilisationnel, dans le cadre de la vigilance contre les velléités de temporaliser, c’est-à-dire de politiser, l’autorité spirituelle et les tentatives de mêler et confondre religion et politique. Aussi, a-t-on vu nos ancêtres, tantôt alliés aux Omeyyades, tantôt kharidjites, dans leur État Rostomide, tantôt chi‘ites, engagés avec les Fatimides jusqu’en Égypte pour récuser la légitimité ‘abbasside, tantôt de nouveau sunnites avec les Hammadites, pour en rester aux seules grandes lignes d’un parcours beaucoup plus riche et plus chatoyant…
On est loin de la vision idéologique simpliste et réductrice d’une « Umma mohammadiya », grande « poupée russe communautaire » dans laquelle viendraient s’emboîter les autres « poupées russes » plus petites, les communautés de base, tribales et familiales ! Ce qui constitue l’identité – plus amplement que « culturelle » – de notre peuple, G. Meynier « ancré » dans ses préjugés ne peut pas le comprendre. Il ne peut prendre la mesure de cet « héritage de gloire et de regrets à partager » sédimenté sur des acquis historiques déjà conséquents, au cours de ces quinze siècles arabo-musulmans, et dont le moindre des achèvements n’est pas la résistance opiniâtre d’Abdelkader, ni même sa glorieuse reddition : glorieuse, parce qu’elle ne signifiait pas soumission, mais appel à son peuple à tendre ses efforts pour assimiler ce qui faisait la force de l’agresseur afin de trouver le meilleur moyen de le battre[5]

La situation des Européens et des juifs d’Algérie…

Il n’est pas besoin de trop rallonger ces rappels historiques, car on ne peut prêcher un convaincu, qui se pose des questions sur la « nation du Fln », en en saucissonnant la matière dont justement Renan, qu’il convoque, estime qu’elle constitue dans son ensemble, la condition de ce “plébiscite de chaque jour” qui doit réunir les citoyens d’une nation. Et surtout, en récusant ce contenu historique de la nation comme ne correspondant pas au « sens qu’a donné à ce terme l’historiographie du 20e siècle, considérant les théorisations et le cheminement des nationalismes depuis l’invention des nations au 19e.» Ce qui l’amène à étudier « sous ce rapport la situation des Européens et des juifs d’Algérie dans les représentations et dans la pratique du Fln… »
Cette question étonnante, à laquelle il prétend que le Fln n’a pas donné de réponse qui permette à ces minorités de s’« agglutin(er) finalement à la nation algérienne », mérite qu’on s’y arrête un peu.
Étonnante, elle l’est, tout d’abord, parce que si quelqu’un avait besoin d’une nation, ce n’étaient ni les Européens, français d’office, ni les juifs qui le sont devenus, d’office également, avec le décret Crémieux, mais c’étaient bien les « indigènes » ; et le Fln n’est que le résultat de la longue quête infructueuse de ces derniers, des mêmes droits de citoyens que ces minorités, depuis l’émir Khaled, sinon depuis Abdelkader. Bien évidemment, Européens et juifs voulaient être Français en Algérie, qui devait rester départements français comme si c’était une terre sans peuple …
Étonnante, la question l’est encore, parce que si l’on s’appuie sur la définition de Renan, quel “passé”, quel “héritage de gloire et de regrets” ces minorités peuvent-elles “partager” avec les « indigènes » pour envisager “vouloir faire encore de grandes choses ensemble” avec eux ? Ce passé commun est, pour l’essentiel, “la nuit coloniale” pour les « indigènes », la “glorieuse épopée civilisatrice” pour la plupart des autres. Si l’on ajoute « l’incomblable fossé de sang entre les communautés d’Algérie, que l’Oas fit encore déborder en 61-62 » – que G. Meynier, notons-le, expédie par une pichenette à l’aide de son « outre » – on est, comme qui dirait, devant la quadrature du cercle !
Pour qu’il y ait donc “consentement, …désir clairement exprimé de continuer la vie commune”, il faut, pour ceux qui ont seuls profité du passé colonial, oublier ce passé, tout comme le préconise Renan quand il dit :
L’essence d’une nation est que tous les individus aient beaucoup de choses en commun, et aussi que tous aient oublié bien des choses*. (…) tout citoyen français doit avoir oublié la Saint-Barthélemy, les massacres du Midi au 13e siècle…
Mais pour G. Meynier, ce qu’il faut oublier, c’est tous ces éléments avec quoi le Fln aurait “bricolé” “sa” nation : “son” « État », « la tradition résistante érigée en mythe fondateur … la patrie, …l’identité culturelle, …cet emboîtement de poupées russes communautaires (…), de la communauté de base – la tribu – à l’umma l-muhammadiyya (…) de l’islam universel…», ce qu’il faut donc effacer, c’est tout ce passé précolonial disqualifié et impropre à constituer la condition de la nation algérienne… La seule condition possible pour construire une nation algérienne, si l’on suit G. Meynier, reste donc ce passé colonial qui, malgré tout, aurait ouvert les portes de la modernité à cette contrée et à ses habitants, modernité cristallisée déjà par les minorités juive et européenne.
Comme il est grand le risque de devenir apologiste – malgré soi ? – du colonialisme ! Et de se faire l’écho de l’entreprise actuelle de négationnisme colonial et même de participer d’elle !

La vision meynierienne de la nation algérienne

Pour prouver cette “inaptitude” du Fln, G. Meynier remonte à l’archéologie du mouvement, en comparant les positions sur cette question de l’Udma, du Mtld et du Ppa :
« Les élus de l’Udma, dit-il, qui siégèrent moins d’un semestre à la IIème Constituante, et avaient remporté un succès au Conseil de la République, voire nombre de parlementaires modérés, s’attachèrent nettement plus que les élus Mtld à définir la nation davantage dans ses spécificités algériennes, dans son passé et son devenir multiformes. Plus clairement, ils y laissaient la place aux juifs algériens et aux Européens. Abbas était pénétré des vues de Renan en matière de définition de la nation, ce “plébiscite de chaque jour″. Le moindre paradoxe ne fut donc pas que les plus radicaux parmi les indépendantistes ne furent pas, loin de là, forcément les plus nationalistes, c’est-à-dire les plus modernes en matière de réflexion sur l’imaginaire national. [Quant au Ppa, il] en resta pour l’essentiel à l’exaltation des marqueurs communautaires islamiques…[6]».
Voilà bien les ingrédients de la vision meynierienne de la nation algérienne. Et ils sont d’autant plus clairs qu’ils sont sortis de leur contexte. Il fait, sans en avoir l’air, un tableau idyllique de la situation, puisque les élus de l’Udma ont pu « remport(er) un succès au Conseil de la République »[7]! Mais à ce moment-là, les élus de l’Udma, « voire nombre de parlementaires modérés*», pouvaient-ils imaginer une autre nation que la française et, par conséquent, laisser dans “leur” nation une « place aux juifs algériens et aux Européens » ? Pouvaient-ils autre chose que quémander une place même très petite, pour eux, aux côtés des juifs et Européens, déjà, eux, Français à part entière ?
C’est donc une marchandise frelatée que G. Meynier veut placer, d’autant que, sous couvert de modernité, il vide l’indépendantisme de son contenu : par un tour de passe-passe soi-disant paradoxal, il valorise ce “nationalisme modéré” en le qualifiant de nationalisme le « plus moderne en matière de réflexion sur l’imaginaire national », par rapport à celui des « plus radicaux parmi les indépendantistes » du Ppa, qu’il accuse de regarder vers un passé révolu…
Entendons-nous bien ! Le frelatage dont nous parlons ne concerne pas l’action des nationalistes « modérés », dans les marges très serrées que permettait le code de l’indigénat ; cette action tenait de l’héroïsme : il fallait vraiment être courageux pour prétendre à la réforme du colonialisme et, par là, l’égalité avec les Français et surtout le revendiquer ; et comme l’émir Khaled l’avait payé par l’exil, beaucoup l’ont payé de centaines d’années de prisons et des amendes astronomiques, sinon de leur vie. Le frelatage dont nous parlons concerne la défense théorique et hors de saison d’un réformisme qui a été disqualifié autant par la stérilité de son action, n’ayant jamais connu de répondant de la part d’un colonialisme resté sourd à ses requêtes[8], que par l’affirmation conséquente de la nécessité de l’indépendance comme solution du problème indigène. Le frelatage concerne cette présentation du “modérantisme” comme du « nationalisme moderne », en comparaison de l’indépendantisme qui s’est affirmé par le Fln, et qui, on le voit nous dit G. Meynier, ne sait pas ce que c’est une nation moderne. Et à ce propos, il précise :
« …Non qu’il n’y eut pas de nationalistes, qu’on songe à Ben Khedda, qu’on songe à Abbane et Ben M’hidi. Ces dirigeants avaient bien un projet pour leur société, exprimé par les directives du congrès de la Soummam. Mais ils étaient en avance sur leur temps et sur leurs compagnons. En effet, leurs visions étaient loin d’être partagée par l’ensemble des cadres du Fln, pour ne pas parler de l’ensemble des militants et a fortiori de l’ensemble de la société*, à quelques exceptions près. Or on sait maintenant que ce sont les nationalistes qui fabriquent la nation ; pas l’inverse.[9]»
Mais on ne sait pas si c’est du simple racisme qui suinte dans cette appréciation de notre société, ou si c’est seulement une façon de conjuguer la thèse apologétique du colonialisme, modernité inaccomplie.
En réalité, même non aboutie, l’action « modérée » a, petit à petit, et par sa vaillante opiniâtreté, ébranlé l’édifice colonial et, avec d’autres facteurs comme les changements sur la scène internationale, elle a contribué à faire mûrir l’idée nationale et sa solution indépendantiste adéquate, que G. Meynier disqualifie avec mépris parce que basée sur l’« exaltation des marqueurs communautaires islamiques », et qui, malgré ce qu’il en pense, a été, avec la fermeté des Messali et autres Belouizdad, l’élément essentiel de ce mûrissement moderne.

Le Fln et la place des pieds-noirs dans la nation algérienne

Pour tout historien sérieux, c’est dans les textes fondateurs qu’il faut chercher une réponse à ce problème, et non dans des positions datées mises en exergue comme argument actuel, alors qu’elles se sont exprimées à un moment où cette question ne se posait pas, sinon à rebours, c’est-à-dire : pouvait-il exister une nation algérienne et quelle pouvait être alors la place des Algériens « indigènes » dans cette entité ?
Tout historien sérieux aurait d’abord, sur cette question de la “nation du Fln”, sollicité la Proclamation du 1er novembre 1954.[10]
* Que disait-elle, cette proclamation ? Bien que rédigée et diffusée clandestinement, ses concepteurs affichaient clairement leur projet :
…Pour nous préciser, nous retraçons ci-après les grandes lignes de notre programme politique : But : l’Indépendance nationale par :
1° – La restauration de l’État algérien souverain, démocratique et social dans le cadre des principes islamiques ;
2° – Le respect de toutes les libertés fondamentales sans distinction de race ni de confession*.
Objectifs intérieurs :
1° – Assainissement politique par la remise du mouvement national révolutionnaire dans sa véritable voie et par l’anéantissement de tous les vestiges de corruption et de réformisme, causes de notre régression actuelle ; 2° – Rassemblement et organisation de toutes les énergies saines du peuple algérien pour la liquidation du système colonial. Objectifs extérieurs : 1° – Internationalisation du problème algérien ;
2° – Réalisation de l’unité nord-africaine dans son cadre naturel arabo-musulman…
“Sans distinction de race ni de confession”. Cette expression inscrit “la restauration de l’État algérien… dans le cadre des principes islamiques”, un cadre inscrit lui-même dans le siècle, c’est-à-dire celui de l’égalité entre citoyens de confessions différentes…
* À qui s’adressait la Proclamation pour mettre en œuvre ce projet ?
À tous les patriotes algériens de toutes les couches sociales, de tous les partis et mouvements purement algériens (invités à) s’intégrer dans la lutte de libération sans aucune autre considération.
Cet appel est de la même veine civilisationnelle que celui, profondément assimilé par notre peuple, qui lui a été adressé par les Arabes lorsqu’ils ont abordé notre pays avec le message islamique ! Comme ces derniers, les promoteurs de Novembre ont tellement confiance dans leur projet –“tâche écrasante qui nécessite la mobilisation de toutes les énergies et de toutes les ressources nationales” –, qu’ils sont sûrs que les meilleurs parmi “les patriotes algériens (…), de tous les partis et mouvements purement algériens*”, ce sont ceux qui se distingueront dans sa réalisation.
Ils sont convaincus que cette tâche, dont l’achèvement par la libération du pays aboutira du même coup à “la liquidation du système colonial”, est mobilisatrice si on arrive à sauvegarder ce caractère national, à quoi renvoie la formule “purement algériens” concernant les partis et mouvements à qui il est fait appel : la tâche concerne la nation Algérie, et ne doit pas être perturbée par des intérêts extra-algériens (français ou internationalistes) ou étroitement partisans. Dans son essence, cette tâche doit se comprendre comme un “assainissement politique… (et un) anéantissement de tous les vestiges de corruption et de réformisme…” à quoi poussent de telles tendances étroites.
On voit donc bien la nature et les contours de « la nation du Fln », et on ne sait pas que les juifs et Européens d’Algérie aient chargé ce dernier de leur y ménager une place. Ils se sentaient, pour la plupart, en tant que Français, mieux défendus par les autorités coloniales dont l’objectif jamais tu, était de garder l’Algérie française ; une Algérie où trouvait à peine un strapontin une petite minorité d’« indigènes évolués*», toujours tenus à l’œil pour le “mal léché” de leur évolution. En ce sens, les rédacteurs de la Proclamation disaient :
… afin d’éviter les fausses interprétations et les faux-fuyants, pour prouver notre désir réel de paix, limiter les pertes en vies humaines et les effusions de sang[11], nous avançons une plate-forme honorable de discussion aux autorités françaises si ces dernières sont animées de bonne foi et reconnaissent une fois pour toutes aux peuples qu’elles subjuguent le droit de disposer d’eux-mêmes.
Cette reconnaissance devait, en conséquence, s’étendre à celle
de la souveraineté algérienne une et indivisible (…) et à la reconnaissance officielle de la nationalité algérienne par l’abrogation de toutes les lois faisant de l’Algérie une terre française en déni de l’histoire, de la géographie, de la langue, de la religion et des mœurs du peuple algérien.
En contrepartie, la Proclamation garantissait :
1) les intérêts français culturels et économiques ;
2) le choix, pour les Français désirant rester en Algérie, entre leur nationalité d’origine (et alors ils seraient étrangers vis-à-vis des lois algériennes en vigueur) et la nationalité algérienne avec tous les droits et devoirs y afférents ;
3) que les liens entre la France et l’Algérie seront définis d’un commun accord entre les deux puissances sur la base de l’égalité et du respect réciproque.
Telles sont les contours tracés par le Fln à la nation algérienne moderne, et telle est la base de principe sur laquelle n’ont pas transigé ses négociateurs à Evian et que la France coloniale a dû admettre pour aboutir au cessez-le-feu. Mais ce qui est significatif de l’ouverture moderniste du Fln, c’est qu’il inscrive dès sa constitution en 1954, la garantie de ce choix ouvert aux “1.200.000 autochtones français” greffés sur le corps national, estimant que cette greffe monstrueuse leur avait fait acquérir, de par une histoire dépassant tout le monde, “le droit à l’existence, et à l’existence dans leur patrie algérienne”, tel que le revendiquera Camus dans son mémoire de 1958 ; avec, cependant, la correction, dont la France allait enfin convenir en 1962, que cette patrie n’était pas la France et était séparée de la France. C’était là une contribution de la part du peuple algérien au règlement humain de cette injustice historique dont il n’était pas responsable et envers une population intruse, elle-même non responsable de ce déni de l’histoire, mais en profitant…
Ce règlement juste, le Fln l’a défendu – notamment à Évian – comme le droit, donc, pour “les Français désirant rester en Algérie” à opter pour “la nationalité algérienne avec tous les droits et devoirs y afférents” ; ses négociateurs l’ont défendu contre la volonté des autorités et des négociateurs français de voir ces Français qui ont fait souche en Algérie s’y maintenir en tant que communauté française à part[12]. On ne sait pas si cette solution – si elle avait prévalu – aurait pu leur permettre de s’« agglutin(er) finalement à la nation algérienne »… Mais c’est le statut de citoyens que le Fln dès sa constitution, et l’Algérie arabo-musulmane à son indépendance ont proposé loyalement à ceux qui voulaient l’adopter, déclarant tout aussi loyalement que ceux qui désiraient rester sans rompre avec “leur nationalité d’origine” pourraient le faire mais comme “étrangers vis-à-vis des lois algériennes en vigueur”.
*Comment a-t-il été accueilli ce projet national proposé par le Fln, par les divers secteurs de la société algérienne, aspirant à une nation algérienne, et intéressés par ces propositions ou les craignant ?
Pas besoin de nous appesantir sur la réaction du peuple algérien dans ses profondeurs sans le soutien persévérant duquel l’entreprise, très fragile à ses débuts du fait du manque de moyens et des graves divisions qui menaçaient le mouvement national d’implosion, aurait connu la fin dramatique des nombreuses insurrections précédentes. Passons tout aussi rapidement sur la résonance qu’a eu l’appel dans la conscience et le cœur des militants des différents partis nationaux : leur enthousiasme a forcé la main à leurs dirigeants, poussant ces derniers à mettre de côté leurs propres visions et programmes d’avenir pour le pays, pour répondre positivement à l’appel du 1er Novembre de joindre leurs efforts autour de la tâche de lutte armée pour l’indépendance nationale. La longue cohorte de chouhada, de toutes les couches sociales et sans distinction de race ni de confession*, tombés au champ d’honneur dans les maquis, dans les geôles des tortionnaires assassins ou affrontant crânement la guillotine[13], y compris pieds-noirs, ainsi que le grand nombre d’amis français inquiétés, emprisonnés, assassinés et accusés de traîtrise à leur patrie, sont un signe qui ne trompe pas de ce retentissement.
Mais il est un témoignage important à verser à ce dossier de la nation algérienne ouvert par le 1er Novembre. C’est celui du regretté abbé Scotto[14] que nous nous excusons de citer longuement, parce que c’est un témoin autorisé pour sa place particulière dans la société pied-noir et dans l’Algérie pré- et post-indépendance, et qu’il parle avec franchise et honnêteté de la complexité de l’affaire et la façon dont il a décidé de l’affronter.
Son travail pastoral et son activité sociale l’amènent à comprendre “de plus en plus clairement l’injustice faite aux populations algériennes par le régime de colonisation : blessure de dignité, avenir barré…” Il précise :
Vers 1950 (...) a commencé à cheminer en moi l’idée que l’établissement de la justice dans ce pays passait par le droit à ce qu’on n’appelait pas encore l’autodétermination. Et cette idée s’est imposée, elle est devenue une conviction de plus en plus claire...
La guerre d’indépendance le met durement à l’épreuve. Charnel­lement lié à son peuple pied-noir, il souffre de le voir “pris à 100% » sous le charme maléfique de l’action psychologique dont “l’armée avait appris le manie­ment en Indochine”. Il s’efforce, pour le libérer de cet ensorcellement, de le convaincre, au nom de l’Evangile, qu’“une Algérie française née de l’exclusion des Algériens et de l’Algérie [est une] contradiction”. En mai 1961, après le putsch des généraux, l’archevêque Mgr Duval, a convoqué son clergé pour dénoncer ceux qui “veulent entraîner les chrétiens dans le sillage de l’"Algérie française" au nom de leur christianisme”. À ce propos, Scotto souligne : “Ce discours (...) est un très grand moment, un moment de particulière clarté.”
Les pieds-noirs sont en effet écartelés entre “l’amour de leur terre et l’amour de leur patrie”, et les évolutions entrevues à travers les résultats de l’action sociale, dans quoi Jean Scotto avoue avoir “mis peut-être un peu trop d’espoir”, ont fait long feu. Vers la fin de la guerre, Mgr Duval le charge d’une mission difficile à la tête de l’église de Maison-Carrée (El Harrach) :
Nous sommes à la veille de l’indépendance de l’Algérie, lui dit-il. Si cette église et cette paroisse ne changent pas d’allure, nos chrétiens seront terriblement malmenés. [Mais] c’est le temps de l’OAS, le temps du mépris des hommes, le temps de la débâcle qui finalement frappe irrémédiablement les pieds-noirs… [Et c’est alors] la grosse épreuve [du] départ en foule de nos paroissiens [où il voit] un certain échec de l’Eglise.
Cette tournure des choses lui fait dire qu’il est “un homme vaincu” et lui fait haïr l’OAS “parce que non seulement elle a tué des Algériens, mais parce qu’elle a tué le cœur de mon peuple pied-noir.” En tant qu’homme d’Eglise qui – contrairement à un Berenguer – n’est arrivé, et au terme d’une douloureuse évolution, qu’à la seule prise de conscience morale de l’injustice coloniale, il ne peut voir que l’OAS est la réponse logique, sinon légitime, à cette décolonisation qui remet en cause radicalement la raison d’être de ce peuple et son statut de Français sur cette terre algérienne. Les pieds-noirs se voient sacrifiés au nom d’intérêts qui ignorent les leurs propres (“leur sol, leur terre”, leurs privilèges...), et il ne leur reste désormais qu’à négocier leur place avec le peuple algérien dont sont, soudain, reconnues la justesse de sa cause et la souveraineté sur ce pays.
C’est pourquoi le père Scotto porte une blessure : alors qu’il continue de souhaiter voir pour l’Algérie “un devenir d’amitié avec la France”, il souffre que la séparation entre les deux pays se soit faite dans d’aussi mauvais termes ; que “malgré les beaux discours”, le sentiment de supériorité des Européens – “et j’en suis” – est toujours là ; que dans les journaux algériens “jamais une fleur n’est faite à la France, même quand elle a une bonne initiative ou une action valable”, et de même dans les journaux français à propos de l’Algérie ; que “la récupération de l’identité algérienne sous la forme de l’arabo-islamisme” se fait de plus en plus “avec une grande part d’agressivité” et mène à la “renonciation à ce qui était une richesse de ce pays, un certain bilinguisme et une certaine double culture”...
Cette blessure “très simplement reconnue avec une loyauté morale inséparable du loyalisme civique”, ne l’empêche pas de faire le choix d’être Algérien. Même si “changer de nationalité n’est pas un geste facile à poser. L’appartenance à un pays, même pour celui qui n’a pas un grand patriotisme affiché, touche aux fibres profondes de l’être, à ses racines.” Choix fait par “besoin de prendre la nationalité d’un pays et de gens que la majorité de ma communauté avaient tenus en mépris”, une sorte de réparation ; en plus du fait que, par sa naissance, il appartient à ce pays, et que par vocation, l’Eglise étant au service de ce pays, il éprouve le “désir d’une communion de vie” avec son peuple ; même si, découvrant petit à petit que “le peuple algérien est lui aussi travaillé par Dieu”, une certaine volonté missionnaire latente qu’il portait s’est épurée.
Dans la foulée de ce choix, et l’insuffisance de maîtrise de l’arabe lui pesant, il a voulu “une acculturation plus grande”. Il s’est même dit : “Pourquoi pas faire la prière au même moment, pourquoi pas faire le ramadan ?” Mais avec le temps, il se dit dérangé par l’apparition d’un islam “prenant un aspect plus « clérical » et s’affirmant de plus en plus massivement, de plus en plus extérieurement (...) presque agressivement.” Il avoue : “au premier appel du muezzin, je commence par l’insulter quand je suis tout seul ; puis je me dis : « je ferais mieux de dire l’angélus, il me sert de cloche ce muezzin ».”
Sans doute instruit de l’infériorisation de l’islam, malgré le nombre de ses adeptes, dans la société coloniale laïco-chrétienne, il se sent ici infériorisé dans un statut de “deuxième collège” –de “dhimmi”, un terme qui s’impose à lui comme legs idéologique de l’orientalisme occidental “militant”.[15] Et c’est ce statut que le père Scotto dit devoir assumer dans la société islamique algérienne “au nom de ma foi, en pensant à ceux qui viendront après moi ou aux autochtones qui pourraient devenir chrétiens” !
Il ne passe pourtant pas sous silence les épisodes d’heureuse communion qu’il a vécus avec les Algériens musulmans, notamment « les belles années de Belcourt » à quoi son livre consacre un chapitre. Années où, en dhimmi ? sous régime du parti unique, le FLN, dont il ne s’est jamais réclamé et qu’il a critiqué lorsqu’il a estimé nécessaire de le faire, il a été porté, en son absence, sur la liste des candidats aux municipales, en 1967, et unanimement élu ; où, en dhimmi ? il a vécu l’“atmosphère d’extraordinaire amitié (...) dans le même souci de servir la promotion des pauvres”, entouré de la sympathie des autorités civiles qui encourageaient les activités dont il était la cheville ouvrière ; où, en dhimmi ? il déclare, lors de sa consécration en 1970 comme évêque : “J’ai une reconnaissance immense envers ce pays qui m’a vu naître et dont les habitants, mieux connus et mieux aimés au fur et à mesure que le temps passe, m’ont aidé, à leur manière, à mieux vivre à la lumière de ma foi”… Ou encore le jour où, évêque en tournée dans son diocèse de Constantine, il dit à la petite communauté de religieuses, dhimmi(e)-rabaissée ? : “Mais, nom de nom, votre père c’est qui ? C’est le mozabite du coin ou c’est moi ?”, quand il s’est aperçu qu’elle “aurait déjà dû mettre la clé sous la porte sans les commerçants qui lui font crédit”…
Ce beau et douloureux témoignage fourmille d’exemples similaires montrant un homme de devoir, – tout tendu par son sacerdoce et son ardent “désir d’une communion de vie” entre les deux populations que beaucoup de choses avaient tenues séparées –, confronté à la difficulté de se saisir de ce qui peut aider à sa mission, dans cet héritage calamiteux laissé par la domination coloniale. Cette quête douloureuse pose avec justesse les vrais problèmes humains auxquels se heurte la bonne volonté des gens les plus impliqués qui cherchent un nouvel équilibre au moment des indépendances devenues incontournables. On aurait aimé voir la même démarche animer le travail de G. Meynier qui est tout tendu, lui, à trouver, au contraire, un baudet sur qui on peut crier : haro !
Laissons-le méditer sur l’aveu de Jean Scotto : “Changer de nationalité n’est pas un geste facile à poser. L’appartenance à un pays, même pour celui qui n’a pas un grand patriotisme affiché, touche aux fibres profondes de l’être, à ses racines.” !

‘Abdel ‘alim Medjaoui, février 2006

[1] Éd. Casbah, Alger, 2003, (A. Fayard, Paris, 2002) p. 682.
[2] C’est nous qui soulignons les parties marquées par un astérisque (*).
[3] Histoire intérieure du Fln, Op. cit., p. 29.
[4] Le FLN militarisé de G. Meynier, publiée dans la revue Maçâdir, éditée par le Centre national d’Études et de recherche sur le mouvement national, n° 10, spécial Révolution du1er Novembre, 2ème semestre 2004.
[5] Dans sa Lettre aux Français (Éd. Phébus, Paris, 1977, p.164), il dira métaphoriquement mais clairement que cela ne se terminera… « que par le sabre et la lutte à mort*», avec son regret que n’ait pas pu se concrétiser le projet qu’il avait proposé, en 1840, aux Français, de construire ensemble.
[6] Histoire intérieure du Fln, Op. cit., p. 91.
[7] Ce qui fait passer pour normal et conjoncturel le fait restrictif qu’ils « siégèrent moins d’un semestre à la IIème Constituante »…
[8] On l’a constaté même dans des conditions apparemment favorables, comme lorsque le gouvernement du Front populaire a déçu l’espoir que les revendications “modérées et modernes en matière de réflexion sur l’imaginaire national” du Congrès musulman pouvaient être satisfaites, puisqu’elles rejoignaient le projet gouvernemental Blum-Violette…
[9] Histoire intérieure du Fln, Op. cit., p. 249.
[10] G. Meynier ignore quasiment ce texte fondateur qu’il n’a sans doute pas jugé utile d’éplucher pour son Histoire intérieure du FLN…
[11] Cette pétition de principe pacifiste n’a pas convaincu G. Meynier qui, dans son Histoire intérieure du Fln (Op. cit., p. 679), décrit ce qu’il appelle les « nostalgiques orphelins de l’OS » comme des gens « qui brûlaient d’en découdre manu militari avec le colonialisme » !
[12] "Exigence" maladive des tenants d’un apartheid qui ne dit pas son nom, qui croient pouvoir s’en sortir avec toutes sortes de circonvolutions et de mesures de “discrimination positive”, alors qu’il leur suffit de promouvoir et de mettre en application honnêtement la citoyenneté dont ils s’enorgueillissent qu’elle constitue la base de “leur” société moderne.
[13] Et en criant : “Vive l’Algérie !” La reconnaissance officielle de la « Guerre d’Algérie » ne fait-elle pas de ces militants des prisonniers de guerre et de leur exécution par la guillotine autant d’assassinats ?
[14] Que nous tirons de son livre Curé pied-noir, évêque algérien, Paris, Desclée de Brouwer, 1991.
[15] Cet orientalisme de combat a chargé la dhimma d’un contenu historique absolument négatif. Il lui était difficile de faire oublier les drames des guerres religieuses dont les victimes (papistes en pays protestants, ou huguenots en pays catholiques) auraient été bien heureuses de profiter de la dhimma qui protégeait leurs contemporains minoritaires en pays musulmans. Il a détourné l’attention vers l'état d’inférieur et de débiteur de ces derniers envers les autorités de leurs pays, comme si les traitements définitifs que subissaient les minorités religieuses en Occident pouvaient supporter la comparaison avec un traitement inégal ! Et ne parlons pas des juifs dont l’histoire dans les pays à direction musulmane n’a jamais retenu de pogroms contre eux, à l’inverse de ceux dont sont parsemés les siècles européens, jusqu’au plus barbare, celui organisé par l’Allemagne nazie, au nom et avec l’aide, comme on l’a vu en France, des autorités judéophobes de ce pays…

jeudi 9 octobre 2008

Le Géant aux yeux bleus

Introduction
Extrait n°1
« …À travers ce retour sur des faits, des données qui ont composé la vie de notre société et ont tissé sa réalité globale, je veux essayer d’analyser ce réel en devenir ; je veux tenter de le comprendre en dépassant le sentiment que j’en ai eu – moi, comme la plupart de ceux qui l’ont vécu – comme des échecs ou des victoires selon des critères de justice ou d’iniquité, ou de bilans de bataille.
Quand on voit rappeler les différents moments de cette réalité, l’on ne manque pas de relever que le présent pèse sur notre mémoire au point de la brouiller et l’altérer en la parant de préoccupations qui n’existaient pas alors. Selon nos maîtres en matière d’histoire, cette grave déformation ne permet ni de se faire une idée rationnelle de ce qu’a été ce passé, parce qu’on ne lui reconnaît ainsi aucune réalité objective, ni de bien comprendre le chemin qui a mené de là à la situation présente.
Les douleurs de ce cheminement, l’enchaînement des situations qui le jalonnent, et l’affrontement des idéologies à travers quoi se produit une réadéquation des éthiques et des mœurs, tout cela exige beaucoup de fermeté afin d’échapper aux facilités de la langue de bois. En tout cas, je m’efforcerai de ne pas me laisser aller à ressusciter ces moments de notre histoire tels que je veux les voir et non tels qu’ils ont été : je veux m’en tenir autant que possible à leur sens premier, à leur fraîcheur propre, en dehors de quoi le jugement porté sur eux ne peut tirer pertinence.
Seule une telle fermeté méthodologique, assidûment prêchée par Jacques Berque dont elle traverse toute l’œuvre, permet d’apprécier à sa juste valeur la geste de notre peuple : confronté à un environnement mondialisant plus que jamais hostile à l’élan libérateur et aux justes revendications non encore satisfaites des peuples qui ont secoué le joug colonial, notre société tend et s’applique à se hausser au niveau des exigences d’un combat renouvelé. Elle le fait en consolidant son Etat national, en recomposant son unité nationale, en appui sur l’émergence d’un capital national capable de se faire une place de dignité dans l’économie mondiale, ainsi que sur le large spectre chatoyant de ses diverses couleurs idéologiques et socioculturelles...
À travers cette expérience, me semble-t-il, notre société pose toujours un problème général qui dépasse les limites de notre pays, et qui ne laisse indifférents ni notre ancien colonisateur, ni les différentes forces qui animent l’action du peuple français, ni les divers acteurs de la politique mondiale : notre peuple poursuit sa lutte pour donner la réponse la plus juste, la meilleure possible, au problème non encore résolu malgré les indépendances politiques, celui de la décolonisation qui reste le problème par excellence de notre temps, celui dont la solution déterminera la marche du monde dans ce IIIème millénaire. Et ce n’est pas faire preuve de prétention déplacée que d’estimer que le grand acte par quoi notre peuple a fourni une contribution majeure dans la chute du système colonial, le place dans la perspective de tenir encore un rôle considérable dans l’œuvre de remodelage en cours du monde, particulièrement dans notre aire méditerranéenne et arabo-africaine.
Hier en effet, notre mouvement national, et en particulier sa pointe nationaliste dite “radicale”, n’avait-il pas perçu la nécessité – et donc la possibilité – de changer un monde qui avait pourri, dans des indices que beaucoup d’observateurs voyaient affleurer à la surface de l’ordre colonial : la misère vécue dans la chair et l’âme des gens, les déceptions de promesses de réformes jamais tenues, l’incapacité croissante des autorités colonialistes à maintenir les choses en l’état...? Et aujourd’hui, avec d’autres forces dans le monde, ce même mouvement national anime, à la lumière des besoins de notre vie étatique et nationale nouvelle, l’action pour la mise à l’ordre du jour d’une nécessité de même nature. Et cette nécessité, les plus clairvoyants la discernent aussi à des signes semblables étendus de façon hyperbolique à l’échelle du monde entier : contradictions et perversions persistant et s’aggravant, dont un Nord prospère veut convaincre qu’elles sont naturelles après « la fin de l’histoire » annoncée avec la chute du communisme ; résistance opiniâtre de l’immense majorité de l’humanité qui en souffre ; grandes déceptions suscitées par les indépendances politiques qui étaient censées les soulager ; et l’on note une même incapacité croissante des grands dominants de ce monde à maintenir les choses en l’état, malgré les moyens colossaux, militaires, politiques et idéologiques qu’ils déploient pour venir à bout des dramatiques explosions qui se produisent de plus en plus souvent, et plus encore pour annihiler les espoirs en un monde plus juste et plus solidaire.
Convergeant objectivement mais aussi de façon de plus en plus perceptible au niveau des consciences inquiètes de ces évolutions, tous ces facteurs tendent à accabler l’ordre dominant, brutal et impitoyable, en retournant contre lui autant une morale et des valeurs dont il n’est pas le dernier à se draper, que l’efficacité socio-économique dont il se targue pour expliquer ses réussites, mais qui jure avec l’aggravation de ses vices et contradictions. Car cette situation ne trouble pas seulement une opinion publique occidentale de plus en plus soumise à la précarité économique et sociale et à une sorte de maccarthysme généralisé qui veut dicter aux gens les positions politiquement correctes, mais elle pose aussi problème aux tenants de l’ordre qui domine le monde. Elle aiguise ainsi leur détermination à empêcher que les indépendances politiques ne débouchent sur toute remise en cause de leur mainmise planétaire sur les richesses du monde.
Aussi cette domination veut-elle s’assurer les conditions de sa pérennité et de son plus large déploiement en s’efforçant d’anesthésier l’esprit critique des gens et de délester les peuples des moyens de leur souveraineté : souvent chèrement acquise, celle-ci leur est contestée au nom de notions qui fleurissent, à l’image de celles qui avaient préludé à la colonisation de continents entiers sous couvert de les civiliser. Telles les notions de « bonne gouvernance », de « démocratie », devenues des prétextes pour des prétentions et même des entreprises visant à reprendre en main la gestion, par dessus leurs têtes, des affaires intérieures de pays auxquels on a dû concéder une indépendance politique après la leur avoir âprement marchandée. (…) »

mercredi 5 décembre 2007

ديناميكية الحركة الوطنية وتناقضاتها2 . مصير التراث التاريخي لجبهة التحرير الوطني


لقد نجحت فكرة الاستقلال في أقل من أربعين سنة في تكسير الطوق الاستعماري فتجسدت ببراعة في الاعتراف الدولي بالجزائر. واكتنزت خلال هذا المشوار إرثا سنسعى لتتبع مصيره عبر إشكالية التجمع والحوار التي تكلم عنها عبد الحميد مهري بصدد جبهة التحرير الوطني التي كانت بوتقة لها والأزمة الطويلة التي تتخبط البلاد فيها منذ خمسة عشر سنة.

الكفاح المسلح والسياسي

لقد كان العامل "السياسي" في مشروع نوفمبر هو القائد، إذ أن الكفاح المسلح كان الرد ذا الطابع السياسي المرموق لحالة الانسداد آنذاك، ولاسيما أن الشعب سانده بكل قواه، مساندة أبرزت أن العملية ليست مغامرة كما كان يخشاه مصالي والمسئولون الآخرون للـ"ببيا-أمتيالدي" (Mtld-Ppa)، مما أرغم هؤلاء على الالتحاق بالحركة... ولما وضع مُفجرو نوفمبر الاستقلال السياسي كقاعدة دنيا لربط علاقات جديدة مع فرنسا، فإن مبغاهم لم يكن رفض أي تسوية توافقية مع المستعمر، بل كانوا يسعون إلى تحقيق "فصم سوسيولوجي وكذا قطيعة تنظيمية في تاريخ الحركة الوطنية"، حسب تعبير ملائم للأستاذ إلسنهانس، وإلى متابعة النضال طبعا في المُركب السياسي الجديد من أجل استقلال يفتح الطريق أمام بروز رأسمال وطني.
وإن التحاق عبان بالحركة أعطاها دفعة قوية من خلال المجهود الجبار الذي بذله: لربط الصلة بين النواحي المختلفة التي كانت إلى ذاك الحين تنشط كل من جهتها على حدة، وبينها وبين الخارج، ولإعلام الرأي العام الوطني والدولي بمشروعية القضية وحقيقة الكفاح المسلح وحيويته، ولتنشيط الكفاح وتزويده بمساندة كل القوى الاجتماعية التي كان من الممكن لفُّها حوله. ولقد مهد هذا النشاط الحيوي لانعقاد مؤتمر السومام رافعا معنويات جيش التحرير الوطني الفتيّ، حتى صعُبت مهمة المستعمر وأُجبر على إظهار الحقيقة الخبيثة لطابعه اللاإنساني.
وسرعان ما أرغمت الملاحقة والقمع أغلب المسئولين على اللجوء إلى الخارج. مما قلل من أهمية فرضية الأولويتين: أولوية "الداخل" بالنسبة لـ"لخارج" و"السياسي" بالنسبة لـ"لعسكري". وأحس من بقي من مفجري الثورة على قيد الحياة بأن هذا التمييز مُفتعَل وكأنه ينطوي على إرادة حط من قيمة مبادرتهم واعتبارها نشاط يفتقر إلى محتوى سياسي، وتبرير وضعهم كـ"عسكريين" تحت وصاية مسئولين آخرين "سياسيين" مؤهلين لقيادة حركة نوفمبر. فكانوا عازمين على الدفاع عن موقعهم المستحق في القيادة وعلى صون توجه مبادرتهم الأصلي من مغبة "إفساده" هو بدوره تحت غطاء قرارات السومام.

التحدي الخطير الذي طرحته السياسة "الدوغولية"
وتجدر الملاحظة أنه كما يبدو في " المراسلة بين الجزائر والقاهرة"[1]، لم ترتبط المجابهة بمن كانت قامت بينهم في أول الأمر بل تواصل الخلاف والصراع حتى بعد وفاة أو اعتقال زعماء القضية الرئيسيين الأوائل، مما يدل على أن المشكل يتنافس فيه التياران الأساسيان في الحركة الوطنية. ولقد تجلى ذلك في التنافس الذي كان قائما بين من كان يرمز إليهم بـ(les "3 B") "الباءات الثلاث"- الثلاثة كلونيلات في جيش التحرير، بلقاسم كريم و بن طوبال وبوصوف- وبين "السياسيين"، المركزيين السابقين. وكانت خَلْفِيةُ ذاك التنافس التحدي الذي طرحته على قادتنا سياسة دوغولية اتسمت بأكثر واقعية وأكثر هجومية من سابقتها، سياسة الجمهورية الرابعة، وزادت خطورة بقدر ما كان سر منطقها خفيا حتى على أوساط فرنسية نافذة.
إن دوغول سلم بالشرط الذي وضعه نوفمبر لإقامة علاقات جديدة بين البلدين. فسعى لبرد أظافر حركة التحرير بخنق الكفاح المسلح الذي يشكل جوهرها وقوتها الفاتحة. وكان يتوق إلى أن تنبثق خارج جبهة التحرير أو في وسطها "قوة ثالثة" يمكن لها التكفل بحل توافقي نيوكولونيالي- استعماري ذي وجه جديد-. فسلط حربا ضروسا على جيش التحرير وبقي منتبها إلى تطورات ميزان القوة في قيادة الثورة بين التيارات "المعتدلة" للحركة الوطنية والنواة الثورية لقادة الكفاح المسلح الأولين: ويكون قد رأى في ترأس فرحات عباس للحكومةَ المؤقتة عدمَ تفوُّقِ أحد تيارَيْ الامتيالدي السابق المتنافسيْن بينهما على الآخر وإبطالاً متبادلاً لنفوذ بعضهما البعض، ثم في إنشاء اللجنة الوزارية المختلطة المسماة بلجنة "الباءات الثلاث" تفوقا للتيار "الصلب" الذي أفشل بالأمس لعبة العروض الاستعمارية الكاذبة والذي قد يعقد المفاوضات حول الحل التوافقي النيوكولونيالي؛ وأما صعود بن خدة لرئاسة الحكومة المؤقتة فيكون قد مثل بالنسبة لدوغول حسما لصالح التيار الذي كان ينتمي إليه الرئيس الجديد والذي كان برز فيه ميول نحو "الاعتدال".
وبما أن دوغول كان يفضل التعامل مع هذا التيار فكان مثله مثل القط وهو يداعب الفأر، يداعب الحكومة المؤقتة بتقديمه تنازلات مغشوشة: فتراه يقدم اقتراحه بـ"سِلْم الشجعان" الذي يبدو عن طريقه وكأنه يعترف بـ"من هم يكافحون في الميدان" إلا أنه بهذا في الحقيقة يتدخل بحذاقة في الجدل الداخلي للجبهة وكأنه يقول بأن هؤلاء "الشجعان" لا يمكن أن يمثلهم القادة "العسكريون" الذين هم في مأمن في الخارج، وبهذا يطعن في الموقع السياسي "للعسكريين" في الحكومة المؤقتة. كما تراه يضغط بتهديدات تقسيم الجزائر بين جزائر مُسلمة مبتورة من الصحراء والنواحي ذات الكثافة السكانية الأوربية العالية ومحكوم عليها أن تبقى متأخرة، وجزائر فرنسية عصرية وقابلة للتقدم. وهذا أيضا من ضروب الضغط على ما يسميه الطرف الفرنسي "التيار القومي العربي الاشتراكي" لجبهة التحرير الذي لا يمكن أبدا التفاهم معه.
وتُضاف إلى ضغوطات ومناورات العدو الفرنسي هذه تلك التي يضغط بها المحيط الإقليمي والدولي دافعا إلى حل موال للغرب لا يبتعد عن الحلول التي وافق عليها جيراننا المغاربة والتونسيون.
فمِن الطبيعي إذن أن يخيم مناخ شك في وسط القيادة وأن تقوم فيها خلافات داخلية مشروعة حول مسألة السلطة، أي حول الأداة التي تُمكِّن من صياغة ثم تسيير الحل السياسي التوافقي الذي قد تقوم على أساسه العلاقات الجديدة مع فرنسا. ولا سيّما أن الكفاح المسلح الذي أصبح من المستحيل تزويده بالسلاح والكوادر من الخارج، أُخمِد إلى حد أنقص من تمثيلية القيادة، مما جعل الرئيس فرحات عباس يبدي قلقه مما آلت إليه الأمور في أوت 1960.
ولقد أثرت تلك الوضعية تأثيرا كبيرا على الحكومة المؤقتة ولا سيّما على وزرائها المكلفين خصيصا بالكفاح المسلح، "الباءات الثلاث" (les "3 B") وقيادة الأركان العامة لجيش التحرير الوطني، وبلغ المأزق إلى أن أصبح يُفكّر في التخلص بتحوير جذري لسياسة التحالف التقليدية للحركة الوطنية المتسمة بمعاداة الشيوعية وبالحياد. ولقد بقي لها من ذاك الهروب إلى الأمام ما سُمِّي بـ"التوجه الاشتراكي" الذي وإن مكنها من التميز به عن مواقف التبعية النيوكلونيالية (الاستعمارية الجديدة)، إلا أنه كان عنصرا دخيلا على برنامجها الأساسي.
وها بالشعب يتحرك برد فعل سياسي من النوع الذي يواجه به الأوضاع الحاسمة خارجا في مظاهرات عارمة مؤكدا مساندته للكفاح التحرري التي لم يحد عنها منذ أول نوفمبر 54، فأفشل حسابات دوغول الذي كان يظن بعدُ أنه أحكم قبضته على عدو لم يبق له إلا أن يُليِّن مواقفه، وأرجع بذلك للحكومة المؤقتة تمثيلية لم يكن لها أن تتحصل عليه عبر ألف تحالف من الصنف الذي كان يُنوى عقده على حساب استقلال القرار.
ويبقى أنه بالنسبة للهدف الذي سطره الكفاح المسلح والذي نجحت الوطنية الوفية لمبادئها في جمع مختلف قوى الحركة الوطنية لتحقيقه رغم خلافاتها، من حقنا أن نُعلن مع المرحوم سعد دحلب: "لقد أُنجزت المهمة". هذا ما صنع مجد جبهة التحرير الوطني و"تجرُبتَها النضالية الثمينة"... كل هذا تبلور في الإرث الثوري الذي يُتأسَّف لما أصابه من ضياع خلال الأزمة الراهنة ومن إخضاع "للأهواء والحسابات السياسية الضيقة". وطبعا يحتوي هذا الإرث على الأزمة التي تفجرت فور الإعلان على توقف القتال والتي لم يحقنها الهدف المشترك إلى ذاك الحين إلا بصعوبة.

"أفلان" الاستقلال

ولقد توترت الأوضاع حول تثمين اتفاقيات إيفيان حيث كانت الحكومة المؤقتة تجزم عن حق أن الاتفاقيات كرست المطالب الأساسية لنوفمبر وتمثل أقصى ما كان يُمكن التحصيل عليه، في حين أبدت فيه قيادة الأركان العامة لجيش التحرير تحفظات مشروعة بالنسبة لمحتواها النيوكلونيالي. ولقد قام آنذاك خصام حساس بين "العسكريين"، بين "الباءات الثلاث"- وكان يدعمهم زملاءهم "المركزيون" في الحكومة المؤقتة- وبين قيادة الأركان العامة، وكأنها نسخة ثانية للمجابهة التي وقعت بين رجالات نوفمبر- وكان يدعمهم "المركزيون"- وبين مصالي. إلا أنه في القضية هذه لم يكن ممكنا التخلص بالقوة من الوزن السياسي لقيادة الأركان العامة ولا سيما أن زكاها بن بلة، إذ أن الأمور تعقدت بتدخل القادة الخمس المعتقلين الذين شحنوها بنزاعاتهم الخاصة بهم والتي كان سعَّرها سجنُهم الطويل. وبما أنه لم يتم توافق حول برنامج طرابلس رغم إقراره بالإجماع ليصبح ائتلافا مواصلا للتحالف الذي انصهر في جبهة التحرير الوطني، انطلق تسابقٌ على السلطة بين تيارات مختلفة تُمثل كلها "أفلانات" مختلفة.
وتحققت تحت الضغط الشعبي ("سبع سنين بركات") وإلى حد ما، تسوية حول بن بلة بمساندة قيادة الأركان العامة وجيش التحرير الوطني المرابط بالخارج. إلا أن الخلافات برزت من جديد حول "الأفلان" الذي عزم بن بلة على إقامته مستندا في ذلك على برنامج طرابلس ثم على ميثاق الجزائر: "أفلان" أُقصي منه الواحد تلو الآخر رفقاءه السابقون، فأنشأ كل حزبَه "الاشتراكي" – (الأففاس- Ffs - والبياراس- Prs) أو الديمقراطي (الأمديارا - Mdra) – وأعلنوا معارضة مطلقة للسلطة...، "أفلان" توطن فيه بالعكس التيار التروتسكي- الشيوعي مستفيدا من تلك الانقسامات ومن التبني الرسمي للاشتراكية ومن المواقع التي كان قد اغتنمها في النقابات وفي الصحافة...، "أفلان" تطور فيه حس مناهض لروح العسكرية نتج عنه عداء خفي للجيش ولإدارة الدولة الفتية. وأما التيار "المركزي" فبدا وكأنه أخفق إلا أنه بقي متربصا.
وأمام تشرذم القيادة الوطنية وتفتيت جبهة التحرير الوطني ارتأى بومدين أن يضطلع بنفس المسئولية التي اضطلع بها رجال نوفمبر تجاه مستقبل الثورة، فاستولى على السلطة على حساب كل هذه الزعامات موليا الأولوية للجيش والمؤسسات الأخرى للدولة ومستندا في مسعاه هذا على الدفعات الثمينة التي كونها "المالق" (Malg- وزارة التسليح والاتصالات العامة) دون أن يستغني على ما تكوَّن منها في إطار برنامج قسنطينة. وأما "الأفلان"، فنقحه من عنصر اليسار وحوله إلى مجرد جهاز أولاه مهمة "استرجاع" النقابات (للعمال والطلبة) وتخليصها من النفوذ التروتسكي الشيوعي. وقام في نفس الوقت بهيكلة المجتمع وتطوير البلاد في طريق معادية للنيوكلونيالية- الاستعمار الجديد-. كما سعى للم شمل الوطنية واسترجاع لُحمتها بالاستناد على أوسع من قاعدة جهاز الحزب، على "كوادر الأمة" التي استثمر مجهودا جبارا لتحضيرها (في مدارس عسكرية والمدرسة الوطنية للإدارة وجامعات...) واشتهر عمله بتأميم المحروقات واستعمال الريع البترولي لإنشاء رأسمال وطني منتج على قاعدة قطاع اقتصادي معتبر تابع للدولة وانتهاج سياسة معادية للإمبريالية ومساندة لحركات التحرر.
وفي المجال الإيديولوجي "صحح" بومدين ميثاق الجزائر باعتماد الميثاق الوطني لـ1976على أساس ما تحقق من إنجازات منذ 1962. إلا أن معارضيه انتقدوا سياسته "الاشتراكية" انطلاقا من معايير "اشتراكياتهم" وعند وفاته وأمام التكريم الذي كرمه به الشعب اعترف بوضياف بأنه أخطأ عندما عارضه، وكان الوحيد من بين معارضيه الذي وقف هذا الموقف.

إلا أي مدى تذهب المجابهة بين التيارين ؟

وكان العالم وقتها في تطور سريع حيث أن الغرب تخلص من تداعيات انهزام النظام الاستعماري أمام النضال التحرري وانطلق من جديد بمبادرات هجومية لصد مطالب الحركات الوطنية وتثبيت سيطرته. وعوض أن يفكر خلَفُ بومدين في تكييف البلاد مع هذا التطور حتى تتمكن الأمة من مقاومتها له، سارعوا بالعكس إلى الاتفاق بينهم على إقصاء التيار الأكثر وفاء لخطة الرئيس المرحوم من السلطة التي كان قد شاركهم فيها. فاستحوذوا علي أشلاء جبهة التحرير وأقاموا "أفلانا" شديد التحيز إلى حد لم يصله بعدُ وأشركوا في قيادته الضباط السامين للجيش الوطني الشعبي ظنا منهم أن هذا الإجراء سيزيده نفوذا[2]، وجعلوا من هذا الأفلان محور جهاز السلطة، وانتهجوا تحت شعار "من أجل حياة أفضل" سياسة معاكسة لسياسة بومدين التي اعتبروها مفرطة التقشف.
وعوض أن يُدخَل ما كان يجب من إصلاحات على ما كان أقامه بومدين مواصلةً لمجهود التطور، أوقِف الاستثمار، وأصبح تسيير الريع يتسم باللا مسئولية واللا مبالاة إلى حد أن أََُفرِغت الخزانة وأثقل دينٌ لا يطاق كاهلَ البلاد. وانتشرت الرشوة والجِهوية من جراء التصرف السياسي "للأفلان" حيث جُزِّئت معالم الوطنية إن لم تُطمس، مما أدى بالطبع إلى إضعاف مجتمعنا وإخضاعه أعزل إلى نيوكلونيالية لُقِّبت بـ"الصديق". وإن ما زاد انغلاقَ "الأفلان"على العنصر الأمازيغي للشخصية الوطنية خطورةً اللجوءُ فيما يخص الرعاية الدينية إلى استيراد "مرشدين" غير الأئمة الوطنيين الذين كان يذود بومدين عنهم. وإن أدلجة القيم الوطنية هذه أخلت بالتماسك الوطني والاجتماعي إخلالا خطيرا وزادت الطينَ بَلّةً في تعقيد الأزمة التي عصفت بالمجتمع وتعدّدِ أبعادها.
وجاء أكتوبر 1988 بانتفاضته على "نظام الأفلان" القائم منذ رحيل بومدين. فسرعان ما اضطرت سلطة "الأفلان" لإرجاع رمز من رموز "البومدينية"، قاصدي مرباح، إلى سدة الحكم، كما أحست بضرورة مراجعة تركيبها تحت رعاية "الصديق" المهتم بالأمر من وراء البحر وربما حسب إرشادات منه قصد توقيف رجوع التيار "البومديني" للحكم وحتى اقتسام السلطة معه.
ومُسٍح الموسى في المرحوم مساعدية، وأعيد انتخاب الرئيس، وطُرِد مرباح بتهمة عدم التحمس للقيام بالإصلاحات، لتُسنَد هذه المهمة لخَلَفِه المُتحمس لفكرة "إما تمر وإما تتكسر" (ça passe ou ça casse)، حتى يُتَغلَّب على نقاط المقاومة ويُكَرَّس ما تحقق من مكاسب خلال أكثر من عشرية من مسار على المنهاج الريْعي التي لم يُمكِن تكريسها بعدُ في مجال المؤسسات الاقتصادية والمالية... وعُزِّز في قيادة الجيش موقعُ الرجل الذي أضعف المؤسسة قبالة الخطر المرتقب أن تُهدِّد به حركةٌ إسلاميةٌ مُسيَّسَةٌ شجعتها تعدديةٌ مطلقة العنان متحمسةٌ لتدمير الحركة الوطنية بقدرٍ لم تكن لتحلم به "ديمقراطية لا بول"[3]... ولم يزد هذا الترقيع إلا تعقيدا للأزمة.
ولم تزل ضرورةُ التصحيح قائمة: فطُرحت ضرورةُ مغادرةِ الرئيس ثم رجوعٍ إلى الأصل إلى رمز من رموز نوفمبر هذه المرة، بوضياف، الذي نفر من هذا "الأفلان" ونادى بإعادة تأسيس الحركة الوطنية... ثم بعد مأساة وفاته، أُجبِر وزيرُ الدفاع على التنحِّي لصالح القرين الذي رُفِضت وجهته رغم تفوق بُعدِ نظَره عليه بخصوص سياسة الدفاع الوطني، ثم عُيِّن وزيرُ الدفاع الجديد لرئاسة الدولة، فبذل جهدا قويا لتعزيز الدولة ورد الاعتبار لها بعد ما كادت تنهار تحت ضربات إرهاب شرس، ثم قُدِّم للشعب في أولى انتخابات رئاسية تعددية في تاريخ البلاد، فأحس الشعب أن فيها بوادرَ تجديد وتحمَّسَ لها... وانتهج الرئيس الجديد سياسة "الرحمة" و"لم الشمل" لعزل الإرهاب وإرجاع إلى حظيرة الحركة الوطنية جناحِها الذي غره إسلامٌ سياسي مستورد.
وأما "الأفلان"، فها هو يتقوقع حول رجل رمز آخر، من "المركزيين" السابقين، ع.مهري، ويسعى إلى تنظيم ائتلاف يزعم أنه يعمل من أجل إخراج البلاد من الأزمة إلا أنه في واقع الأمر يسعى إلى إدامتها ليمنع التيارَ الوطنيَّ الآخر من إعادة تأمين وجوده في السلطة؛ فتراه يسعى لتكذيب نجوع السياسة التوحيدية التي يدعو إليها الرئيس المنتخب وعدالتها، بل لمعارضته بالسعي لفرض مشروعية حزب تمَوْقَع في موقع غير وطني، "إسلاموي" كمُناقِض ومُعادٍ للحركة الوطنية؛ كما تراه في مسعاه هذا يتذرع بديمقراطية مزيفة ولا يتردد في الاعتماد على التدخل الأجنبي رغم ما يترتب عن ذلك من أخطار على وجدان الأمة ذاته كما يَتَّضِِح في فظاظة المأساة التي ألمت بالأمة العراقية الشقيقة. وبما أن كل هذه المساعي باءت بالفشل أمام متطلبات التصحيح المُلِحَّة فتراه ينادي بإسكان البلاد في مرحلة انتقالية دائمة دون حسم أي شيء...
تلكم معالم الأزمة وهاهم الفاعلون فيها. ويتجلى لُبُّها في الصراع والتفاعل بين التيارين الأساسيين للحركة الوطنية على السلطة أي على ما يُعطي قُدرةَ توجيه السياسة الوطنية. ويجري هذا الصراع تحت ضغط مصالح أصبح من الصعب التجرؤ على تسميتها بالنيوكلونيالية مما يدل على مدى استرجاع الغرب لزمام المبادرة، إلا أن الصراع يتتبعه أيضا شعبُنا بيقظة دائمة ولا يتراجع عن التدخل فيه كما فعل في أول نوفمبر 54 ثم في ديسمبر 60 ثم في 62 عند الاستقلال ثم في 88... في الأوقات الحاسمة لحسم الموقف بوزنه الثقيل لصالح الحلول- من بين التي تُقدِّمها له نُخبُه- التي يراها تخدم المصلحة الوطنية.

عبد العليم المجاوي
مجاهد، كاتب (أفريل 2004)

[1] راجع مبروك بلحسين، المراسلة بين الجزائر والقاهرة، 54-56، دار القصبة، الجزائر، 2000 (بالفرنسية) ما ورد على يد عبان في رسالة مؤرخة بالرابع من نوفمبر55 (ص.108) يؤكد فيها بصراحته الجافية أن : "... بن بلة ليس ممثلا لجيش التحرير الوطني في القاهرة، ولا بوضياف ولا أيت أحمد ولا خيدر ولا لحول، الخ. إنكم وطنيون هاجرتم إلى الشرق. وكلفتكم جبهة التحرير وجيش التحرير الوطني بمهمة. ليس إلا (...) أما بن بلة وبوضياف فمهتهما تقتصر على مصلحة العتاد والاتصال معنا..." وأوضح (ص.95) في رسالة سابقة (8.10.55) عن حديث مع الصحافي بارا لـ"فرانس أبسرفاتور" أنه لـ"السارجان" عمران ولمفوض سياسي للجبهة..."
[2] والغريب في هذا أن من أقدم على هذه الخطوة التي رسمت لأول مرة موقعا للقيادة السامية للجيش في السلطة السياسية هو التيارُ الذي كان دائما يشتكي من هيمنة "العسكريين" على "السياسيين" في قيادة جبهة التحرير الوطني...
[3] "الديمقراطية" التي أفتى بها الرئيس الفرنسي ميتيران في اجتماع "لا بول" (La Baule) على "ضيوفه" الرؤساء الأفارقة ليتحلوا بها في بلادهم إن أرادوا رضاءه عنهم ومساعدته لهم.

ديناميكية الحركة الوطنية وتناقضاتها

لقد اطلعت باهتمام بالغ على مداخلة عبد الحميد مهري بعنوان: "أزمة الأفلان"، لب المشكل، (الوطن، 15 فيفري 2004) وها بعض ما ساور بالي من أفكار إثر ذلك.
لم يكن لي الشرف أن انتسبت إلى نخبة المناضلين – وهو من أواخر من بقي من بركتهم – الذين نشطوا حزب الوطنية تحت قيادة مصالي الحاج منذ الثلاثينيات من القرن الماضي، وإني مدين لذلك الرعيل الأول لما حضروه من ظروف أتاحت لي شرف المساهمة المتواضعة تحت قيادتهم ومعهم في إنتاج الناتج الجبار الذي كان بالنسبة لنا حلما مستحيل التحقيق. وإن الأمة عبر أجيالها الجديدة تعترف لهم بالجميل وتتعود على تكريمهم وتبجيلهم كلهم دون التفريق بينهم، ولربما قد يستعصي عليها إيجاد ما يكفيها من إنجازات مرموقة لوضع أسمائهم على واجهاتها.
ولقد قدرت كثيرا أن أبدى ع. مهري "وعيه بأنه على الذي عايش مثله الكثير من تلك الأزمات في جبهة التحرير وقبلها، ليس بالسهل محو آثار الماضي في الحكم على الحاضر"، وأن نبه بعبء "ذاتية التجربة المباشرة" على ما يكتب. مما يشجع على التعقيب على مداخلته. وسأسائله بكل احترام في نقطتين اثنتين: أولاهما "لب" الاختلاف الذي لا يجب "التحايل" عليه، وثانيهما "التجمع" و"الحوار".

1. التراث التاريخي والشعبي لـ"لأفلان"

لقد اجتهد ع. مهري لتوضيح أزمة "الأفلان" الراهن بمقارنته لها بأزمة حزب الشعب مع إبراز تحفظ لما قد ينجرّ من مجازفة عن هذه المقارنة لما تختلف فيه الوضعيتان سياسيا وتاريخيا. فيقول إنه "يكتشف في الحالتين تشابها في استحالة (...) مجابهة المأزق السياسي..." ويُنسِب عن جدارة مأزق الأمس "إلى تعنت الإدارة الاستعمارية" في وجه مطالب واقتراحات الحركة الوطنية، مضيفا أنه "ما من شك أن العجز المكبوح (...) كان سبب انفجار ذاك الصراع العقيم" وأن "محاولة التحايل على ذلك المأزق بالقفز دونه وغض النظر عنه أدى بالأطراف المتصارعة إلى الدخول في حلقة مفرغة والسقوط في فخ التشخيص والقذف والمجادلة العقيمة".
وكنت أترجى تفسيرا مقنعا للُبّ المشكل يقدمه أخيرا طرفٌ في الأزمة مؤهلٌ لذلك يكون قد تمكن من التفاعل مع الأحداث بعد أن همد غليانُها مع مر الزمان. إلا أنني اضطررت إلى الرجوع إلى مراجع أخرى لأتمكن من فهم ما ورد عنه من تلميح أكثر منه من وضوح بخصوص أزمة حزب الشعب دون أن يتعرض لصميمها. وجاء عنه أن الأزمة تمحورت حول مسؤولية "التداعيات السلبية الناجمة عن سياسة قام الجميع بتدبيرها وتنفيذها (...) فيما يخص النشاط السياسي العلني (المشاركة في الانتخابات البلدية الجزائرية) أو النشاط السري (إنشاء المنظمة الخاصة المسلحة ثم التعامل مع انعكاسات كشفها من طرف السلطات الفرنسية)." وأمام هذا الوضع قلد كلا الطرفين – رئيس الحزب، مصالي الحاج، واللجنة المركزية – الطرفَ الآخر مسؤولية المأزق. وها بنوفمبر يتقدم كحل له.
وذكر ع. مهري أن مصالي كان مؤيدا للجوء إلى الكفاح المسلح، كما تفوه به لمصطفى بن بولعيد، إلا أنه كان يقيد انطلاقه بحتمية "تطهير الحزب". وأن مناصرين لمصالي اعتدوا على بوضياف ورفقاء له الذين كانوا منهمكين في تحضير نوفمبر وكان المعتدون أُقنِعوا بأنه من حقهم معاقبة "انحرافيين"، الشيء الذي كاد أن يؤدي إلى اعتقال المعتدى عليهم. وإما الطرف الآخر فإن "الفقيد بن يوسف بن خدة الأمين العام للحزب" كان "يرسل البعثة تلو الأخرى من المركزية ليوضح للمناضلين أن مصالي لم يحترم القانون الأساسي للحزب". وأبرز ع, مهري تفاهة ذاك النشاط بروايته لشهادة شخصية رواها عليه "أحد المركزيين الذين شاركوا في تلك الحملة" حيث قال له أنه "عقد قبل اندلاع الثورة اجتماعا مع مناضلين استمعوا له بأدب ثم التحقوا غير مبالين بما سمعوه منه بالمواقع التي حُددت لهم في الكفاح المسلح".
وقبل التمعن فيما يُطلعنا ما يرويه لنا ع. مهري على لب الأزمة لا بد من السعي لتبيان ماهية هذا التباين في صفوف الحزب الاستقلالي.
تياران أساسيان في المجتمع
إن فكرة الاستقلال كحل وحيد للمشكل الاستعماري كانت، إلى غاية أزمة 54، محل إجماع في حزب الشعب-الحركة من أجل انتصار الحريات الديمقراطية [الـ"ببيا-أمتيالدي" (ppa-mtld)] ضد أوهام إمكانية حلها بإصلاحات في ضل الاستعمار كما كانت تتوهم به التنظيمات التي كانت تنضم إليها النخب الاجتماعية الثقافية (المسماة بـ"المعتدلة" من "المنتخبين" و"أحباب البيان" و"العلماء". وإننا لا نذكر هنا الشيوعيين لأنهم كانوا معادين أصلا للاستعمار إلا أنهم كانوا من جهتهم يقعون في وهم تغيير الوضع الاستعماري عن طريق الثورة الاشتراكية في فرنسا...)
ولقد ترسخت فكرة الاستقلال وأحرزت تقدما إلى حد أن برز تيار استعماري في الخمسينيات مصرحا بأنه يفضل الشراكة مع "نصف ثوار" عوض التعامل مع "عملاء" (ويقصد هنا الخاضعين من الجزائريين أو على الأقل "المعتدلين" منهم). وفي 1953 أقيمت تجربة شراكة لتسيير بلدية الجزائر تجسيدا لذاك الاعتراف الاستعماري بالحركة الوطنية... إلا أن الموقف بدا لمصالي وللمناضلين الموشكين على تفجير نوفمبر وكأنه بزوغ ظاهرة الوهم الإصلاحي – في قلب حزب الاستقلال هذه المرة –، الوهم بأنه، ببعض من الذكاء السياسي وبتوسيع التحالفات، يمكن استدراج الاستعمار إلى الاعتراف باستقلال الجزائر أو بعبارة أخرى يمكن إصلاح الاستعمار.
غير أن هذا الفكر الإصلاحي يختلف عما سبقه من فكر "معتدل"، إذ أنه لا يقتصر على التعبير عن انشغالات نخبوية مثل سابقيه، بل هو تعبير على انشغالات أوسع تجدرا في المجتمع وتجسيد لانتعاش نخب تقليدية كانت صمدت أمام المساعي الرامية للقضاء على وجودها الاجتماعي الاقتصادي وأصبحت تسعى للترسكل في حظيرة الفكر الاستقلالي مبدية إرادتها في تبوئها لدورها في قيادة المجتمع، متمثلة للنخب القيادية في البلدان المجاورة لبلادنا، طامحة في استدراج الاستعمار للمفاوضة معها على استقلال الجزائر، مما كان يضفي عليها شرعية كتيار اجتماعي أساسي لا تقل ضرورته عن ضرورة التيار الراديكالي بالنسبة لاستقرار المجتمع.
وقد تبلورت تلك الشرعيتان بتميزهما عن بعضهما البعض عبر مسار طويل، كلاهما ساع - في وجه الحكم الاستعماري- لتغليب نظرته للنضال الوطني التحرري على نظرة الآخر ومدافع عن منطق منافس لمنطق الآخر ومؤسس لقواعدَ تصنيف للمهام والوسائل مغايرةٍ لقواعدِ الآخر إن لم تكن تناقضها، ولكن قصد نفس المهمة، مهمة الحصول على استقلالية القرار السياسي. وتخللت هذا المسار التبلوري- التمييزي محطات هامة، منها الأزمة "البربرية" في 1949 وانفصام 1954 الذي شكل حسما أولَ في التباين.

لب المشكل

فمما كان مصالي يريد "تطهير الحزب" ؟ إنه كان يقصد الكيفية التي كانت اللجنة المركزية تنفذ بها توصيات المؤتمر الثاني للحزب: سياسة نعتها بالنيوكوكلونيالية أي الاستعمارية الجديدة. وكانت المركزية تنكر أنها تستحق هذا النقد. ويذكر ع. مهري عن حق أن المركزية وأمينها العام "لا يمكن التشكيك في وطنيتهم وفي اقتناعهم بضرورة الكفاح المسلح"، كما هو وارد في توصيات مؤتمرهم المنعقد بالعاصمة في أوت 54، في الفقرات الخاصة بـ"وسائل النضال" وبـ"سياسة الوحدة".
وكانت جماعة نوفمبر هي أيضا تنبذ سياسة المركزية، وكانوا ينادون بـ"تطهيرها"، مستعملين في تصريح أول نوفمبر كلمة خطيرة لنعتها: كلمة "الفساد"، ومبرزين الوهم الذي كان يقود تلك السياسة. وقد أدخلوا في المعادلة جيش التحرير كرمز لجزائر أصبحت تفاوض لا على الاستقلال- لأنه بالنسبة لها طويت صفحته - بل على العلاقات الجديدة التي يجب إقامتها بينها وبين الدولة المستعمَرة.
هذا هو إذن لب المشكل: كان الاختلاف قائما على الحل الذي كان يمكن به الخروج من المأزق الذي تحقق للكل أن آلت إليه سياسة الحزب أمام تعنت العدو الاستعماري. إلا أن طرفي الاختلاف وقفا ضد الحل النوفمبري لعدم تقديرهما حق التقدير لمساندة الشعب لهذا الحل ولنقص وعيهما بالنوعية الجديدة التي أفضاها على الحركة الوطنية، فعارضاه مُعتبرَيْنٍه دواء أخطر من الداء.
ومن دون شك أن مصالي، مثله مثل المركزية، لم يؤمن بأبسط حظ للثورة في النجاح وكان يخشى تكرار وبأكثر فظاعة مأساة ماي 45 والمجازر الرهيبة التي اقترفها المستعمر يومها، مما كان يغمر حتى محاولته تطهير الحزب وينسفها نسفا. وكانت كلها تقديرات ومخاوف مشروعة لدى قياديين شاعرين بمسئوليتهم في صون الحزب كأداة للاستقلال وبالنسبة لمستقبل الحركة التحررية. إذ أنه يصعب على مسئولين حي ضميرهم القبول بواقع جديد يصنعه فاعلون آخرون يجردونهم بذلك من تلك المسئولية، حتى ولو بدا واضحا أن من تقلد المسئولية محلهم أتى بحل يعزز فعلا الحركة.

الثورة المُنقِذة
وكيف كان رد فعل الطرفين عند اندلاع الثورة ؟

لقد سجل مصالي بسرعة مسانده الشعب للثورة، وأمر محاولا تفادي تجريده من زمام الوضع بتزويد المجاهدين بالمعونة مطالبا مقابلها مسئوليهم بالتصريح أنهم ينشطون باسمه. وإن هذا الموقف السياسي لمصالي من نوفمبر لهو أدل بكثير من الواقعة المؤسفة التي استهدفت بوضياف وأصحابه ضربا، والتي لا بد من الرجوع بصددها إلى ما قد تكون تسببت فيه اللجنة الثورية للوحدة والعمل (crua) عن طريق ما قد يكون جاء في لسان حالها "لوباتريوط" (Le Patriote) رغم إرادة مؤسسيها في توحيد قوى الحزب من أجل العمل الثوري.
وأما "المركزيون"، فمع تأسفهم لفشل المبادرة المرتقب بالحقيق، التزموا موقفا منكمشا ما عدا الفقيد امحمد يزيد الذي أوفده رفاقه إلى الخارج قصد المطالبة بتأخير موعد الثورة إلى أمد أكثر مناسبة والذي لم يتوفر له إلا أن ينضم إليها. وأما ع. مهري، فرفض عرض بوضياف عليه مصاحبته إلى الخارج، فأُلقي عليه القبض ولم يتمكن من الالتحاق بالثورة إلا بعد تسريحه في جويلية 55. ولعله من المفيد أن نطلع عما جاء في رسالة للمرحوم عبان إلى الوفد الخارجي في 4 نوفمبر 55 وهو يقول: "كل ما يتصل بالمركزية السابقة عن بعد أو قرب يكرهه الشعب كرها. لقد نجح مصالي الخبيث في هذا الميدان، وإننا نسعى الآن جاهدين لرد الاعتبار لرجالات المركزية ولخزي مصالي، إلا أنه من الصعب جدا إقناع قرويينا بأن الذي كان يُنعت بالخائن أمس أصبح اليوم وطنيا..." (وكان عبان قد قام بتوزيع منشور في جوان 55 جاء فيه ما يلي: "... [لا بد من] فضح المصاليين على ما لا يزالون يبثونه من فوضى ولبس وكذلك المركزيين الذين يقفون وقفة المتفرج الجبان تجاه نضالنا بل يقدحون فيه خفية...") وإن هذا الوصف المر للوضع يؤكد ما جاء من شهادة على لسان ع. مهري من حالة فقدان ثقة الشعب التي آل إليها رجالات المركزية الموفدون لتوضيح قرارات مؤتمرهم.
لذا يستغرب المرء من أن أصبح مصالي من المعادين لحرب التحرير بيد أنها ضمت إلى صفوفها إثر المجهود الرائع الذي بذله عبان لحشد كل قوى الأمة في الأفلان وحولها لاسيما من كانوا سابقا "مركزيين" ومن رجالات حزب البيان والعلماء والشيوعيين بل وحتى أناس كثيرين نذكر منهم، على سبيل المثال لا الحصر، المرحوم عبد الرحمان فارس الذي كانت تحضر له السلطة الاستعمارية ليكون أول جزائري يعتلي كرسي الحاكم العام للجزائر. ويبقى التساؤل عما منع أن يُوجه هذا المجهود أيضا نحو مصالي ولرُبما أن تُولى له الأسبقية، على الأقل نظرا لما كانت له من قدرات حقيقية كان ليُجندها فعلا منذ ديسمبر 54 في المهجر وفي عدة أماكن جبلية من الوطن.
وما من شك أن كان للتعارض ولـ"صيغ السلوك والتفكير السياسي" التي حددها المأزق أثر في هذه المفارقة، وما من شك أيضا أن لمصالي قسطه في مسئولية الحرب الدامية بين الإخوة التي تواجه فيها الأفلان والأمانا (mna). إلا أن إقصاء هذا التنظيم وما كلفه من فقدان إطارات ومناضلين وطنيين خيِّرين من كلا الجانبين من الحقائق التي لا بد من الرجوع إليها والتمعن في "منطق تبلورها"، إذ أنها نتاج لتفاقم جهنمي لتناقضات الحركة الوطنية في حين كان من الممكن أن يهذبها بروز الحل الذي جاء ليخرج الحركة من الأزمة ويرفع من شأنها حتى يتوسع الـ"ببيا-أمتيالدي" إلى أن يصبح جبهة تحرير وطني تطمح إلى تمثيل الأمة بأسرها.

الإرث التاريخي والشعبي لجبهة التحرير الوطني

يجب التأمل في هذه الحلقة المأساوية من تاريخنا ولاسيما وأنها لم تُنه التضاد بين التيارين الأساسيين للحركة اللذين تستمد من كليهما ثراءها وخصوبتها: التيار "المركزي" والتيار "النوفمبري" الذي حل محل "المصالية"... وإن مكن التيار "الراديكالي" الحركة من الخروج من المأزق في 54، إلا أنه لم يكن بإمكانه تحقيق هدف الاستقلال إلا بحشده حوله للقوى الحية للحركة الوطنية كما تقدم به في تصريح أول نوفمبر، ولاسيما بعقده مع التيار "الإصلاحي" لتحالف وطني ستراتيحي، تحالف قويت أهميته بالنسبة له وللأمة بقدر ما فقد من قوة بفقدانه لجناحه المصالي، تحالف يسعى فيه ليؤكد الدور القيادي والهيمنة لخطه المؤسَّس على القطيعة مع الإصلاحية.
ولقد واجهت الحركة من خلال هذا الصراع على القيادة حلقات صعبةً أخرى ومآسٍ أخرى: وإن ما يشكل واقع "الإرث التاريخي والشعبي" و"التجربة النضالية الثمينة" الذين اكتنزتهما الحركة فصنعا مجدها، هو امتزاجُ المجابهة والشراكة بين التيارين بصِعابه وثراءه وحل المشاكل العويصة التي كان يطرحها العدو الاستعماري على الحركة بتعنته في البحث عن المقابل الجزائري الأكثر "اعتدالا" والأقل تشددا فيما يخص الاستقلال الوطني.

كيف يمكن تثمين هذا الإرث المجيد وهذه التجربة التي اكتنزها ؟

إن ما طبع الإرث التاريخي الشعبي للحركة التحررية العصرية منذ نشأتها هو أنه تراكم عن طريق الحوار والوحدة : حوار بين الحلول المختلفة التي تُقدم لتوحيد القوى الحية للأمة لمقاومة سياسة شرسة تقمع بلا رحمة أو تفسد كل محولة طعن في النظام الاستعماري. إلا أن الحوار لم يكن يخلو من الحرارة والتصادم وحتى التناحر إلى درجة أن سجلنا، بجانب شهداء سقطوا ضحية القمع الاستعماري مباشرة، فقدان وطنيين كثيرين أفذاذ راحوا ضحايا لنزاعات لم يتمكن المتنازعون فيها من حلها حلا سليما، مما دفع أحدَ مؤرخينا وهو يتكلم عن الوحدة التي أقيمت في جبهة التحرير أن ينعتها بالوهم عوض أن تكون حقيقة.
وكذلك كان الحال بالنسبة للحرب بين الإخوة في الجبهة وحركة مصالي، مُكلفة ما لا يطاق تحمله وتاركة آثارا ثابتة وآلاما وأحقادا يتبادلها الجانبان، مما يصعب مهمة مؤرخينا لتفسير تلك الصفحة المؤلمة من تاريخنا بحذافيرها، دون أن يتطرقوا لها عبر الأطروحة الضعيفة التي تقضي بـ"أن الزعيم العجوز أُقصي بسبب تسلطه المفرط وأنه لا بد من الاعتراف له بالحق الذي أفقده إياه تاريخ كتبه من انتصروا عليه..." إذ أن القضية لا تقتصر على مراجعة حدث تاريخي لإعادة الاعتبار أو عدمها لرجل متجادل فيه من رجالات حركتنا التحررية، بل إن بيت القصيد يكمن في الرجوع إلى تلك الفترة الأليمة باعتبارها إحدى محطات تاريخنا الأساسية وإحدى النقاط البارزة من الأزمة: فإن هذا البتر الذي بَترت به الحركة جسمَها من جراء استحالة إقامة الحوار وتخليصه بالوحدة قد يكون بمثابة "الخطيئة الأصلية" التي لا زالت تترتب عنها آثار مزمنة مثقلة كاهل الأمة ومصيرها... وحمدا لله أن جاء نوفمبر ملطفا لحدة ذلك التشويه بفضل الدفعة التي دفع بها عجلة التاريخ عبر تدخل الشعب الذي ألقى بثقل تأييده للثورة مضفيا الشرعية عليها.
وكما كان الحال بالنسبة للمختلف حالات الاصطدام التي تصادم فيها المسيرون إبان الحرب ولاسيما تلك التي تواجه فيها عبان وزملاءه – إلى أن عُزل وقُضي عليه لسوء الحظ – في ما يخص مشكل التفريق بين من صنفوا بـ"سياسيين" و"عسكريين" لترتيب موقعهم في الأجهزة القيادية للثورة (لجنة التسيير والتنفيذ -cce- والمجلس الوطني للثورة الجزائرية -cnra- والحكومة المؤقتة –gpra).
وكما كان الحال أخيرا بالنسبة للانقسامات الخطيرة التي برزت في القيادة يوم استقلال البلاد تاركة المناضلين والشعب في حيرة كبيرة.

(يتبع...)

Bachir, Harbi et Zahouane entre les mains de la police

Mais voilà que nous parvient la terrible nouvelle, confirmant les inquiétudes de Djamel. Un grand coup de filet a été réussi par la police, dans lequel sont tombés Bachir, Harbi et Zahouane, et beaucoup d'autres camarades. Les services n'y vont pas de main morte, et il y a intérêt à avoir de quoi se défendre, me confie Djelloul.
Un "septembre noir" que confirme vite une "Tribune libre" diffusée par Le Monde, titrée Défense des Pieds-Rouges. Ce quotidien s'inquiète de l'arrestation de gens qui ont mis leurs compétences au service de l'Algérie. Comme il ne parvient pas à Alger, c'est par la réponse d'el-Moudjahid que l'on en prend connaissance : Nous n'avons besoin, dit-il, que de compétence technique, pas politique ni idéologique... Cette première confirmation est suivie quelques jours après, par une critique moins retenue vis-à-vis de l'Humanité dont la campagne de dénonciation du coup d'État et de répercussion de nos positions fait beaucoup de tort au pouvoir usurpateur.
Une véritable opération de déstabilisation de l'opposition est entreprise par la presse officielle à coups d'éditos, de billets, tous anonymes, parlant de démantèlement « d'une prétendue opposition révolutionnaire », noyautée par des « coopérants et aventuriers » ; des « étrangers irresponsables » dont s'était entouré le régime déchu et qui voulaient détourner la Révolution algérienne à leur profit. Voilà déjoués ces « agissements inavoués », dont, avec ironie, « on se demande comment des Algériens s'y sont laissés avoir à ce point ». Ce procès suscite l'intervention du journal Le Monde, qui parle de « climat anticommuniste passionnel » où « l'on craint de ne plus discerner bientôt où s'arrête la liberté d'opinion et où commence la collusion avec l'opposition », et de l'AFP, inquiète « des conditions de détention dont auraient été victimes les détenus ». C'est du moins ce que l'on apprend là encore par des réponses d'el-Moudjahid, qui s'adonne à une furieuse campagne anticommuniste : des attaques dont l'un des résultats quasi immédiats est qu'enfin, une douzaine de dirigeants de l'UNEA s'enhardissent à signer – ou s'y voient obligés – une déclaration prenant acte de la carence du CE causée par l'« absence continue et délibérée » de certains de ses membres ; ce qui, disent-ils, gèle l'activité de l'outil de défense des intérêts des étudiants. La diatribe nous vise, nous qui nous sommes mis en clandestinité, et ses auteurs se prétendent « en mesure de justifier [leur] action auprès de tous les étudiants algériens, seuls habilités à juger et orienter les militants qu'ils ont élus à la direction de l'union ». Mais là, ils s'avancent un peu trop à la légère. Car, outre le manque d'ardeur et de conviction pour cette tâche chez nombre d'entre eux, ils n'auront pas l'influence qu'ils croient avoir auprès des étudiants, aux yeux de qui ils apparaissent comme brûlant aujourd'hui ce qu'ils ont adoré hier.
Je suis, pour ma part, perturbé et scandalisé par cette haine anticommuniste qui dégouline des colonnes d'el-Moudjahid. On y parle de mouvement démantelé « qui ne vivait que d'un apport humain et doctrinaire étranger », et en même temps on dit que son “cerveau” est « composé du PCA, de Harbi, Zahouane...» Ce qui veut dire, si on ne va pas jusqu'à nier l'algérianité de ces deux derniers, que c'est au niveau du PCA que se situent les « aventuriers étrangers », « pour lesquels la cause révolutionnaire de l'Algérie n'a jamais été une fin en soi, mais seulement le moyen d'établir le régime de leurs rêves...» À vrai dire, parmi la liste que donne le journal des seize Européens arrêtés, dont six ont la nationalité algérienne, il n'est pas un seul qui ait des prétentions “doctrinaires”...
Très vite, c'est le PCA et Bachir Hadj Ali qui sont pris pour cibles : on expose leur histoire, toute dédiée au colonialisme, dit-on. Et pour en faciliter la compréhension, on la traduit par une infecte bande dessinée traçant les "métamorphoses du PCA" (el-Moudjahid – 28 septembre). Je ne veux pas blesser les sentiments de mes lecteurs en reproduisant le contenu de cette bande scélérate qui marque, ce jour-là, le beau nom de Moudjahid d'une souillure durable.
On peut beaucoup reprocher à ce parti au cours de son compagnonnage, heurté mais souvent mutuellement avantageux, avec les autres courants d'un mouvement national qui a dû suivre lui-même un cheminement complexe pour s'affirmer et finalement conduire la lutte de libération. Mais on ne peut réduire l'histoire du PCA à cette caricature qui constitue une insulte à nos chouhada. Car, qu'on le veuille ou non, Ahmed Inal, Tahar Ghomri, Raymonde Peychard, Maurice Audin, Fernand Iveton, le Dr Counillon et de nombreux autres – qui ont reçu leur éducation politique dans les rangs du PCA – font partie intégrante de cette illustre cohorte dont le sacrifice suprême fait l'orgueil de la nation. Comme leurs frères de combat, ces camarades sont tombés au champ d'honneur ouvert par Novembre : ils l'ont fait au nom de la raison nationale posée par le FLN-ALN, mais aussi de leurs convictions idéologiques propres, forgées dans leur PCA, et leur geste constitue la plus radicale des autocritiques et des rectifications concernant la politique nationale de ce parti. C'est d'ailleurs l'atout avec lequel celui-ci s'est légitimement placé parmi les forces qui, à l'indépendance, ont présenté à la jeunesse leur vision d'une Algérie conforme à leurs « rêves ». Des rêves, en ce qui le concerne, aussi légitimes que ceux de nos amis vietnamiens et cubains, qu'on ne peut accuser de défendre d'autres patries, socialistes, que les leurs.
Des rêves d'autant plus légitimes que le FLN a inclus dans son programme, à Tripoli, le socialisme, jusque-là défendu par le seul PCA. Il était donc normal que ce dernier craignît une édulcoration de cet élément central de son programme et le défendît . D'autant que les luttes dans la direction du FLN semblent s'être nouées autour des réticences concernant cette orientation, conçue chez les plus convaincus, au mieux comme simple moyen de conjurer une orientation néocolonialiste, déjà à l'œuvre chez nos voisins depuis leur libération…

La civilisation arabo-musulmane à l'honneur

Nous sommes fiers de ce que R. Garaudy a réexhumé de notre civilisation dans sa brillante conférence à Ibn Khaldoun, sur la Culture musulmane et l'humanisme de notre temps, puis dans celle qu'il a donnée à Tlemcen sur l'Art musulman. Ce passé glorieux nous pousse à nous emparer sans réserves du socialisme scientifique, et non à créer un autre spécifique. B. Hadj Ali publie, comme pour nous guider dans ce sens, Quelques éléments théoriques de réflexion sur l'Art et la culture dans le cadre de la révolution socialiste.
La civilisation arabo-musulmane est encore à l'honneur dans les manifestations organisées par le Comité Dante de l'université d'Alger, à l'occasion du 700ème anniversaire de la naissance du grand Florentin. Dans les conférences sur la Divine Comédie ou sur Dante lui-même, on a mis en relief le fait que ce dernier a vécu dans un temps où la culture occidentale portait la marque profonde de la pensée arabe antérieure, et que parmi les grands esprits qu'il a, dans son œuvre, cités en dehors du christianisme, il a retenu trois grands noms, ceux de Avicenne, d'Averroès – en qui il voyait surtout l'auteur du "Grand Commentaire" d'Aristote – et Saladin, ce libérateur de Jérusalem de l'occupation des croisés que l'on avait toujours, précise le conférencier, considéré en Europe comme un prince sage et tolérant, modèle de vertus chevaleresques, et dont on fit, avant et après Dante, le héros de maints contes populaires.
De son côté, le professeur Étiemble, invité de l'université d'Alger, confère sur La Chine et l'humanisme universel, et parle de la contribution de ce grand pays à la science universelle, et des inventions (poudre, boussole, papier simple et papier monnaie, imprimerie...) qu'elle a communiquées aux Arabes grâce à qui elles ont été propagées en Europe ensuite. La Renaissance européenne, insiste-t-il, est due essentiellement à l'apport des sciences chinoises et arabes. Il précise que les Chinois ont inventé les examens et concours qui consistaient pour eux en un recrutement démocratique, en ce qu'ils permettaient une sélection des cadres... Quant aux étudiants de l'IGP (Institut de gestion et de planification), ils invitent le professeur Jean Chesnaux pour une conférence sur le Mode de production asiatique qui les initie aux luttes spécifiques de classes qui ont marqué l'histoire coloniale des pays du tiers-monde. Le professeur Maxime Rodinson, invité par France-Algérie pour une conférence, elle aussi très suivie, à Ibn Khaldoun sur Révolution économique moderne et histoire de l'Islam, participe, avec d'autres éminents enseignants français, à une série de cours sur plusieurs semaines pour les étudiants de l'IEP (Institut d'études politiques), sur les Bases historiques et premières étapes du nationalisme arabe. Le professeur Pierre George les enseigne sur Universalité et diversité des phénomènes internationaux. Max-Pol Fouchet, un autre ami de l'Algérie, les entretient de Télévision et problèmes de la culture contemporaine... Quant aux étudiants de l'ÉNA, une des rares structures de l'Enseignement supérieur où nous n'avons pas de comité UNEA, le professeur Maurice Duverger expose devant eux son point de vue sur Démocratie et développement, sous forme de dilemme : qui des deux doit être le premier ? ou doivent-ils marcher ensemble ? pour défendre l'idée qu'il est possible de maintenir une forme de démocratie dans les pays en développement en proie à d'énormes difficultés économiques et où l'autorité est nécessaire et même indispensable. Il ajoute que dans ces pays, le développement est impossible par la voie capitaliste (et il en explique les raisons), et que la voie socialiste est obligatoire au moins à un degré très élevé... Je rapporte ce témoignage d'un intellectuel non communiste pour tempérer les ardeurs critiques de ceux qui, aujourd'hui, lisant l'expérience d'hier en se prévalant d'une prescience après coup, dénoncent doctement le “système antidémocratique et socialiste instauré à tort depuis 1962”!