mardi 4 décembre 2007

La nation selon Gilbert Meynier

La haine est licite aussi bien que l'amour et je la ressens au plus haut point contre ceux qui ont du mépris.
Georg Büchner, Lettre à sa famille, février 1834.

Dans la conclusion de sa volumineuse Histoire intérieure du FLN[1], Gilbert Meynier affirme :
« À l’indépendance, la nationalité algérienne procéda automatiquement de la religion musulmane, et non de ce vouloir être ensemble par-delà les différences, de ce “plébiscite de chaque jour” qui signait, pour Renan, l’appartenance à cette communauté moderne imaginée qu’ordinairement, on dénomme vulgairement nation. »
Voyons ce qu’il y a de vrai et de juste dans cette allégation péremptoire.
Il faut croire que notre historien n’a que superficiellement lu le fameux discours de Renan et qu’il se suffit de ce petit morceau de phrase du grand penseur français avec quoi il croit pouvoir résumer la notion rénanienne de nation. Pour donner une plus juste idée des vues de Renan, il faut revenir à d’autres parties de son texte :
La nation, dit Renan, comme l’individu, est l’aboutissant d’un long passé* d’efforts, de sacrifices et de dévouements. Le culte des ancêtres est de tous le plus légitime*; les ancêtres nous ont faits ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j’entends de la véritable), voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale. Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble*, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple. On aime en proportion des sacrifices qu’on a consentis, des maux qu’on a soufferts. On aime la maison qu’on a bâtie et qu’on transmet*. Le chant spartiate : « Nous sommes ce que vous fûtes ; nous serons ce que vous êtes » est dans sa simplicité l’hymne abrégé de toute patrie.[2]
Renan étaie son idée en soulignant qu’une nation est cette
grande solidarité… (qui) suppose un passé*… un héritage de gloire et de regrets à partager* », bâti sur « le sentiment des sacrifices qu’on a faits et de ceux qu’on est disposé à faire encore (…) Avoir souffert, joui, espéré ensemble, voilà ce qui vaut mieux que des douanes communes et des frontières conformes aux idées stratégiques ; voilà ce que l’on comprend malgré les diversités de race et de langue. Je disais tout à l’heure : “avoir souffert ensemble” ; oui, la souffrance en commun unit plus que la joie. En fait de souvenirs nationaux, les deuils valent mieux que les triomphes, car ils imposent des devoirs, ils commandent l’effort en commun.
S’il avait bien lu ces développements, cette insistance sur l’histoire, G. Meynier n’aurait pas opposé vulgairement le passé, fût-il musulman, au désir de vivre ensemble. Il ne se serait pas épuisé à se poser des questions sur :
« les multiples significations possibles que le Fln (…) put donner à cette nation algérienne pour laquelle il disait coram populo vouloir lutter. » Ni sur « les acceptions suivantes sous forme de plusieurs questionnements :
1.- la nation du Fln se réduisit-elle à l’État ? (…),
2.- la nation du Fln, fut-ce la tradition résistante érigée en mythe fondateur ? Ou bien fut-ce
3.- la patrie ? Ou encore
4.- l’identité culturelle, et laquelle ?
5.- Fut-ce enfin la nation au sens qu’a donné à ce terme l’historiographie du 20e s. (…)? Ou bien encore,
6.- la nation du Fln resta-t-elle ancrée au milieu de cet emboîtement de poupées russes communautaires qui avait façonné jusque-là les identités, de la communauté de base – la tribu – à l’umma l-muhammadiyya (littéralement : communauté mahométane) de l’islam universel ? C’est sous ce rapport qu’a été étudiée
7.- la situation des Européens et des juifs d’Algérie dans les représentations et dans la pratique du Fln. (…), on expliquera pourquoi la manière dont furent envisagées les minorités par le Fln ne permit-elle pas qu’elles s’agglutinent finalement à la nation algérienne.»[3]
Nous nous excusons de cette longue citation, mais elle était nécessaire pour que le lecteur soit au fait des interrogations de G. Meynier concernant le concept de nation tel qu’il essaie de le lire dans l’œuvre du Fln.
Après s’être demandé si pour le Fln la nation se réduisit à l’État, il remet en cause lui-même cette vision restrictive en ajoutant tous les autres éléments qu’il pense lire dans cette « nation du Fln ». Mais son interrogation sur cette question de l’État n’est pas une hypothèse réductrice fortuite inconsidérément avancée puis corrigée, sinon niée, par les compléments qu’il lui fait suivre. Il en veut à la nation-État du Fln comme résultat prétendument « militarisé » d’une lutte indépendantiste aussi prétendument « militarisée ». Nous avons déjà dans une intervention précédente[4], montré que la lutte armée était la seule initiative susceptible d’arracher liberté et droits citoyens à un colonisateur plus que jamais fermé aux revendications de l’Algérien « indigène ». Et contrairement à ce que pense G. Meynier de cette initiative, elle n’est pas un simple retour « à la tradition résistante » mais une nationalisation de cette tradition par le mouvement national moderne.
C’est d’ailleurs ce qu’ont compris les autorités coloniales lorsqu’elles ont été surprises par le 1er Novembre, elles qui croyaient le mouvement national impuissant parce qu’en crise et profondément divisé : malgré la faiblesse du nombre et des moyens des insurgés, elles ont compris que cette fois-là ce n’était plus comme les insurrections d’avant, que cette dernière était réellement nationale. Elles ont été convaincues que si elles n’étouffaient pas dans l’œuf cette “armée de libération nationale” (Aln) avant qu’elle ne prenne corps, elles seront obligées de reconnaître cet “État démocratique et social”, restauré “dans le cadre des principes arabo-islamiques”... annoncé par la proclamation de 1er novembre 1954. Elles ne purent cependant empêcher la Soummam de consolider l’Aln et de préparer les conditions d’une résurgence de l’État algérien dont la création du gouvernement provisoire de la République algérienne (Gpra) fut une étape d’autant plus marquante qu’il voyait sa légitimité confortée par les puissantes manifestations populaires de décembre 1960…

Le fil de l’histoire active

Cet État allait permettre de renouer le fil de l’histoire active du peuple algérien interrompu par plus d’un siècle de colonisation, et la restauration-récupération de cet élément essentiel non retenu par G. Meynier de la définition de Renan : ces grandes choses faites ensemble, ce long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements, ce culte des ancêtres… de tous le plus légitime… sur quoi se base toute nation moderne.
Ce passé ne pouvait être celui des Gaulois, mais il plonge ses racines près d’un millénaire avant que ces derniers ne se signalent par une révolte à laquelle César va donner un retentissement à la mesure de l’honneur qu’il voulait s’acquérir de l’avoir réduite. Un millénaire durant lequel nos ancêtres numides, au contact direct avec la grande civilisation mésopotamienne acclimatée dans nos contrées, ont contribué, avec Carthage, à en diffuser les savoirs et les bienfaits jusqu’en Europe de l’époque… Au point que près d’un siècle avant la défaite gauloise d’Alésia, et près de sept siècles avant que n’émerge le premier État, celui de Clovis, auquel la nation française aujourd'hui se « raccroche », nos ancêtres constituaient le premier État numide dont Massinissa fit la prospérité économique et politique ; ce dont ont témoigné élogieusement les historiens gréco-latins qui, à la suite de Polybe, ont cherché à montrer pourquoi et comment les nations civilisées du monde d’alors sont tombées sous la domination de Rome…
De cette période de plus de cinq siècles de compagnonnage de nos ancêtres avec Rome, puis les Vandales, puis Byzance, l’histoire universelle a retenu les noms d’une kyrielle de Numides dirigeants politiques chevronnés et avisés tels que Jugurtha, dans l’opposition à la colonisation romaine, la dynastie des Sévère à la tête de la Rome impériale ; ceux de nombreux penseurs, écrivains, philosophes et hommes d’Église et du plus éminent d’entre eux, saint Augustin l’animateur de la vigoureuse Église d’Afrique, et la liste pourrait être encore longue…
Puis vinrent les Arabes, ce peuple généreux, ouvert, avec lequel notre peuple vivra une symbiose si étonnante et si parfaite qu’il va devenir lui-même, non seulement musulman en embrassant le message universaliste et humaniste qu’il lui apporte, mais aussi pleinement arabe, en développant de nouveau, comme jamais depuis Massinissa, sa personnalité amazighe. Cette liberté que le grand aguellid avait conquise sur Carthage, et que ses descendants ont défendue pied à pied contre la Rome prédatrice, s’est épanouie dans la nouvelle aire civilisationnelle : au cours du siècle suivant la conquête, nos ancêtres amazighs ont contribué à propager le message civilisateur jusque loin au nord ; puis au-delà de l’aide qu’ils ont apportée aux Omeyyades, chassés par les ‘Abbassides, pour se déployer en Andalousie, ils se sont impliqués, avec d’autres musulmans, Arabes et non-Arabes, dans les luttes – les plus arabes qui soient, opposant les familles des proches du Prophète –, qui concernaient une question civilisationnelle centrale, dont la solution, plus ou moins réussie, a déterminé les progrès et les échecs de l’arabo-islamisme.
Ces luttes ne portaient pas sur des questions de pur dogme religieux, mais sur la légitimité des dirigeants prétendant assumer l’héritage du Prophète, sur la pureté du message civilisationnel, dans le cadre de la vigilance contre les velléités de temporaliser, c’est-à-dire de politiser, l’autorité spirituelle et les tentatives de mêler et confondre religion et politique. Aussi, a-t-on vu nos ancêtres, tantôt alliés aux Omeyyades, tantôt kharidjites, dans leur État Rostomide, tantôt chi‘ites, engagés avec les Fatimides jusqu’en Égypte pour récuser la légitimité ‘abbasside, tantôt de nouveau sunnites avec les Hammadites, pour en rester aux seules grandes lignes d’un parcours beaucoup plus riche et plus chatoyant…
On est loin de la vision idéologique simpliste et réductrice d’une « Umma mohammadiya », grande « poupée russe communautaire » dans laquelle viendraient s’emboîter les autres « poupées russes » plus petites, les communautés de base, tribales et familiales ! Ce qui constitue l’identité – plus amplement que « culturelle » – de notre peuple, G. Meynier « ancré » dans ses préjugés ne peut pas le comprendre. Il ne peut prendre la mesure de cet « héritage de gloire et de regrets à partager » sédimenté sur des acquis historiques déjà conséquents, au cours de ces quinze siècles arabo-musulmans, et dont le moindre des achèvements n’est pas la résistance opiniâtre d’Abdelkader, ni même sa glorieuse reddition : glorieuse, parce qu’elle ne signifiait pas soumission, mais appel à son peuple à tendre ses efforts pour assimiler ce qui faisait la force de l’agresseur afin de trouver le meilleur moyen de le battre[5]

La situation des Européens et des juifs d’Algérie…

Il n’est pas besoin de trop rallonger ces rappels historiques, car on ne peut prêcher un convaincu, qui se pose des questions sur la « nation du Fln », en en saucissonnant la matière dont justement Renan, qu’il convoque, estime qu’elle constitue dans son ensemble, la condition de ce “plébiscite de chaque jour” qui doit réunir les citoyens d’une nation. Et surtout, en récusant ce contenu historique de la nation comme ne correspondant pas au « sens qu’a donné à ce terme l’historiographie du 20e siècle, considérant les théorisations et le cheminement des nationalismes depuis l’invention des nations au 19e.» Ce qui l’amène à étudier « sous ce rapport la situation des Européens et des juifs d’Algérie dans les représentations et dans la pratique du Fln… »
Cette question étonnante, à laquelle il prétend que le Fln n’a pas donné de réponse qui permette à ces minorités de s’« agglutin(er) finalement à la nation algérienne », mérite qu’on s’y arrête un peu.
Étonnante, elle l’est, tout d’abord, parce que si quelqu’un avait besoin d’une nation, ce n’étaient ni les Européens, français d’office, ni les juifs qui le sont devenus, d’office également, avec le décret Crémieux, mais c’étaient bien les « indigènes » ; et le Fln n’est que le résultat de la longue quête infructueuse de ces derniers, des mêmes droits de citoyens que ces minorités, depuis l’émir Khaled, sinon depuis Abdelkader. Bien évidemment, Européens et juifs voulaient être Français en Algérie, qui devait rester départements français comme si c’était une terre sans peuple …
Étonnante, la question l’est encore, parce que si l’on s’appuie sur la définition de Renan, quel “passé”, quel “héritage de gloire et de regrets” ces minorités peuvent-elles “partager” avec les « indigènes » pour envisager “vouloir faire encore de grandes choses ensemble” avec eux ? Ce passé commun est, pour l’essentiel, “la nuit coloniale” pour les « indigènes », la “glorieuse épopée civilisatrice” pour la plupart des autres. Si l’on ajoute « l’incomblable fossé de sang entre les communautés d’Algérie, que l’Oas fit encore déborder en 61-62 » – que G. Meynier, notons-le, expédie par une pichenette à l’aide de son « outre » – on est, comme qui dirait, devant la quadrature du cercle !
Pour qu’il y ait donc “consentement, …désir clairement exprimé de continuer la vie commune”, il faut, pour ceux qui ont seuls profité du passé colonial, oublier ce passé, tout comme le préconise Renan quand il dit :
L’essence d’une nation est que tous les individus aient beaucoup de choses en commun, et aussi que tous aient oublié bien des choses*. (…) tout citoyen français doit avoir oublié la Saint-Barthélemy, les massacres du Midi au 13e siècle…
Mais pour G. Meynier, ce qu’il faut oublier, c’est tous ces éléments avec quoi le Fln aurait “bricolé” “sa” nation : “son” « État », « la tradition résistante érigée en mythe fondateur … la patrie, …l’identité culturelle, …cet emboîtement de poupées russes communautaires (…), de la communauté de base – la tribu – à l’umma l-muhammadiyya (…) de l’islam universel…», ce qu’il faut donc effacer, c’est tout ce passé précolonial disqualifié et impropre à constituer la condition de la nation algérienne… La seule condition possible pour construire une nation algérienne, si l’on suit G. Meynier, reste donc ce passé colonial qui, malgré tout, aurait ouvert les portes de la modernité à cette contrée et à ses habitants, modernité cristallisée déjà par les minorités juive et européenne.
Comme il est grand le risque de devenir apologiste – malgré soi ? – du colonialisme ! Et de se faire l’écho de l’entreprise actuelle de négationnisme colonial et même de participer d’elle !

La vision meynierienne de la nation algérienne

Pour prouver cette “inaptitude” du Fln, G. Meynier remonte à l’archéologie du mouvement, en comparant les positions sur cette question de l’Udma, du Mtld et du Ppa :
« Les élus de l’Udma, dit-il, qui siégèrent moins d’un semestre à la IIème Constituante, et avaient remporté un succès au Conseil de la République, voire nombre de parlementaires modérés, s’attachèrent nettement plus que les élus Mtld à définir la nation davantage dans ses spécificités algériennes, dans son passé et son devenir multiformes. Plus clairement, ils y laissaient la place aux juifs algériens et aux Européens. Abbas était pénétré des vues de Renan en matière de définition de la nation, ce “plébiscite de chaque jour″. Le moindre paradoxe ne fut donc pas que les plus radicaux parmi les indépendantistes ne furent pas, loin de là, forcément les plus nationalistes, c’est-à-dire les plus modernes en matière de réflexion sur l’imaginaire national. [Quant au Ppa, il] en resta pour l’essentiel à l’exaltation des marqueurs communautaires islamiques…[6]».
Voilà bien les ingrédients de la vision meynierienne de la nation algérienne. Et ils sont d’autant plus clairs qu’ils sont sortis de leur contexte. Il fait, sans en avoir l’air, un tableau idyllique de la situation, puisque les élus de l’Udma ont pu « remport(er) un succès au Conseil de la République »[7]! Mais à ce moment-là, les élus de l’Udma, « voire nombre de parlementaires modérés*», pouvaient-ils imaginer une autre nation que la française et, par conséquent, laisser dans “leur” nation une « place aux juifs algériens et aux Européens » ? Pouvaient-ils autre chose que quémander une place même très petite, pour eux, aux côtés des juifs et Européens, déjà, eux, Français à part entière ?
C’est donc une marchandise frelatée que G. Meynier veut placer, d’autant que, sous couvert de modernité, il vide l’indépendantisme de son contenu : par un tour de passe-passe soi-disant paradoxal, il valorise ce “nationalisme modéré” en le qualifiant de nationalisme le « plus moderne en matière de réflexion sur l’imaginaire national », par rapport à celui des « plus radicaux parmi les indépendantistes » du Ppa, qu’il accuse de regarder vers un passé révolu…
Entendons-nous bien ! Le frelatage dont nous parlons ne concerne pas l’action des nationalistes « modérés », dans les marges très serrées que permettait le code de l’indigénat ; cette action tenait de l’héroïsme : il fallait vraiment être courageux pour prétendre à la réforme du colonialisme et, par là, l’égalité avec les Français et surtout le revendiquer ; et comme l’émir Khaled l’avait payé par l’exil, beaucoup l’ont payé de centaines d’années de prisons et des amendes astronomiques, sinon de leur vie. Le frelatage dont nous parlons concerne la défense théorique et hors de saison d’un réformisme qui a été disqualifié autant par la stérilité de son action, n’ayant jamais connu de répondant de la part d’un colonialisme resté sourd à ses requêtes[8], que par l’affirmation conséquente de la nécessité de l’indépendance comme solution du problème indigène. Le frelatage concerne cette présentation du “modérantisme” comme du « nationalisme moderne », en comparaison de l’indépendantisme qui s’est affirmé par le Fln, et qui, on le voit nous dit G. Meynier, ne sait pas ce que c’est une nation moderne. Et à ce propos, il précise :
« …Non qu’il n’y eut pas de nationalistes, qu’on songe à Ben Khedda, qu’on songe à Abbane et Ben M’hidi. Ces dirigeants avaient bien un projet pour leur société, exprimé par les directives du congrès de la Soummam. Mais ils étaient en avance sur leur temps et sur leurs compagnons. En effet, leurs visions étaient loin d’être partagée par l’ensemble des cadres du Fln, pour ne pas parler de l’ensemble des militants et a fortiori de l’ensemble de la société*, à quelques exceptions près. Or on sait maintenant que ce sont les nationalistes qui fabriquent la nation ; pas l’inverse.[9]»
Mais on ne sait pas si c’est du simple racisme qui suinte dans cette appréciation de notre société, ou si c’est seulement une façon de conjuguer la thèse apologétique du colonialisme, modernité inaccomplie.
En réalité, même non aboutie, l’action « modérée » a, petit à petit, et par sa vaillante opiniâtreté, ébranlé l’édifice colonial et, avec d’autres facteurs comme les changements sur la scène internationale, elle a contribué à faire mûrir l’idée nationale et sa solution indépendantiste adéquate, que G. Meynier disqualifie avec mépris parce que basée sur l’« exaltation des marqueurs communautaires islamiques », et qui, malgré ce qu’il en pense, a été, avec la fermeté des Messali et autres Belouizdad, l’élément essentiel de ce mûrissement moderne.

Le Fln et la place des pieds-noirs dans la nation algérienne

Pour tout historien sérieux, c’est dans les textes fondateurs qu’il faut chercher une réponse à ce problème, et non dans des positions datées mises en exergue comme argument actuel, alors qu’elles se sont exprimées à un moment où cette question ne se posait pas, sinon à rebours, c’est-à-dire : pouvait-il exister une nation algérienne et quelle pouvait être alors la place des Algériens « indigènes » dans cette entité ?
Tout historien sérieux aurait d’abord, sur cette question de la “nation du Fln”, sollicité la Proclamation du 1er novembre 1954.[10]
* Que disait-elle, cette proclamation ? Bien que rédigée et diffusée clandestinement, ses concepteurs affichaient clairement leur projet :
…Pour nous préciser, nous retraçons ci-après les grandes lignes de notre programme politique : But : l’Indépendance nationale par :
1° – La restauration de l’État algérien souverain, démocratique et social dans le cadre des principes islamiques ;
2° – Le respect de toutes les libertés fondamentales sans distinction de race ni de confession*.
Objectifs intérieurs :
1° – Assainissement politique par la remise du mouvement national révolutionnaire dans sa véritable voie et par l’anéantissement de tous les vestiges de corruption et de réformisme, causes de notre régression actuelle ; 2° – Rassemblement et organisation de toutes les énergies saines du peuple algérien pour la liquidation du système colonial. Objectifs extérieurs : 1° – Internationalisation du problème algérien ;
2° – Réalisation de l’unité nord-africaine dans son cadre naturel arabo-musulman…
“Sans distinction de race ni de confession”. Cette expression inscrit “la restauration de l’État algérien… dans le cadre des principes islamiques”, un cadre inscrit lui-même dans le siècle, c’est-à-dire celui de l’égalité entre citoyens de confessions différentes…
* À qui s’adressait la Proclamation pour mettre en œuvre ce projet ?
À tous les patriotes algériens de toutes les couches sociales, de tous les partis et mouvements purement algériens (invités à) s’intégrer dans la lutte de libération sans aucune autre considération.
Cet appel est de la même veine civilisationnelle que celui, profondément assimilé par notre peuple, qui lui a été adressé par les Arabes lorsqu’ils ont abordé notre pays avec le message islamique ! Comme ces derniers, les promoteurs de Novembre ont tellement confiance dans leur projet –“tâche écrasante qui nécessite la mobilisation de toutes les énergies et de toutes les ressources nationales” –, qu’ils sont sûrs que les meilleurs parmi “les patriotes algériens (…), de tous les partis et mouvements purement algériens*”, ce sont ceux qui se distingueront dans sa réalisation.
Ils sont convaincus que cette tâche, dont l’achèvement par la libération du pays aboutira du même coup à “la liquidation du système colonial”, est mobilisatrice si on arrive à sauvegarder ce caractère national, à quoi renvoie la formule “purement algériens” concernant les partis et mouvements à qui il est fait appel : la tâche concerne la nation Algérie, et ne doit pas être perturbée par des intérêts extra-algériens (français ou internationalistes) ou étroitement partisans. Dans son essence, cette tâche doit se comprendre comme un “assainissement politique… (et un) anéantissement de tous les vestiges de corruption et de réformisme…” à quoi poussent de telles tendances étroites.
On voit donc bien la nature et les contours de « la nation du Fln », et on ne sait pas que les juifs et Européens d’Algérie aient chargé ce dernier de leur y ménager une place. Ils se sentaient, pour la plupart, en tant que Français, mieux défendus par les autorités coloniales dont l’objectif jamais tu, était de garder l’Algérie française ; une Algérie où trouvait à peine un strapontin une petite minorité d’« indigènes évolués*», toujours tenus à l’œil pour le “mal léché” de leur évolution. En ce sens, les rédacteurs de la Proclamation disaient :
… afin d’éviter les fausses interprétations et les faux-fuyants, pour prouver notre désir réel de paix, limiter les pertes en vies humaines et les effusions de sang[11], nous avançons une plate-forme honorable de discussion aux autorités françaises si ces dernières sont animées de bonne foi et reconnaissent une fois pour toutes aux peuples qu’elles subjuguent le droit de disposer d’eux-mêmes.
Cette reconnaissance devait, en conséquence, s’étendre à celle
de la souveraineté algérienne une et indivisible (…) et à la reconnaissance officielle de la nationalité algérienne par l’abrogation de toutes les lois faisant de l’Algérie une terre française en déni de l’histoire, de la géographie, de la langue, de la religion et des mœurs du peuple algérien.
En contrepartie, la Proclamation garantissait :
1) les intérêts français culturels et économiques ;
2) le choix, pour les Français désirant rester en Algérie, entre leur nationalité d’origine (et alors ils seraient étrangers vis-à-vis des lois algériennes en vigueur) et la nationalité algérienne avec tous les droits et devoirs y afférents ;
3) que les liens entre la France et l’Algérie seront définis d’un commun accord entre les deux puissances sur la base de l’égalité et du respect réciproque.
Telles sont les contours tracés par le Fln à la nation algérienne moderne, et telle est la base de principe sur laquelle n’ont pas transigé ses négociateurs à Evian et que la France coloniale a dû admettre pour aboutir au cessez-le-feu. Mais ce qui est significatif de l’ouverture moderniste du Fln, c’est qu’il inscrive dès sa constitution en 1954, la garantie de ce choix ouvert aux “1.200.000 autochtones français” greffés sur le corps national, estimant que cette greffe monstrueuse leur avait fait acquérir, de par une histoire dépassant tout le monde, “le droit à l’existence, et à l’existence dans leur patrie algérienne”, tel que le revendiquera Camus dans son mémoire de 1958 ; avec, cependant, la correction, dont la France allait enfin convenir en 1962, que cette patrie n’était pas la France et était séparée de la France. C’était là une contribution de la part du peuple algérien au règlement humain de cette injustice historique dont il n’était pas responsable et envers une population intruse, elle-même non responsable de ce déni de l’histoire, mais en profitant…
Ce règlement juste, le Fln l’a défendu – notamment à Évian – comme le droit, donc, pour “les Français désirant rester en Algérie” à opter pour “la nationalité algérienne avec tous les droits et devoirs y afférents” ; ses négociateurs l’ont défendu contre la volonté des autorités et des négociateurs français de voir ces Français qui ont fait souche en Algérie s’y maintenir en tant que communauté française à part[12]. On ne sait pas si cette solution – si elle avait prévalu – aurait pu leur permettre de s’« agglutin(er) finalement à la nation algérienne »… Mais c’est le statut de citoyens que le Fln dès sa constitution, et l’Algérie arabo-musulmane à son indépendance ont proposé loyalement à ceux qui voulaient l’adopter, déclarant tout aussi loyalement que ceux qui désiraient rester sans rompre avec “leur nationalité d’origine” pourraient le faire mais comme “étrangers vis-à-vis des lois algériennes en vigueur”.
*Comment a-t-il été accueilli ce projet national proposé par le Fln, par les divers secteurs de la société algérienne, aspirant à une nation algérienne, et intéressés par ces propositions ou les craignant ?
Pas besoin de nous appesantir sur la réaction du peuple algérien dans ses profondeurs sans le soutien persévérant duquel l’entreprise, très fragile à ses débuts du fait du manque de moyens et des graves divisions qui menaçaient le mouvement national d’implosion, aurait connu la fin dramatique des nombreuses insurrections précédentes. Passons tout aussi rapidement sur la résonance qu’a eu l’appel dans la conscience et le cœur des militants des différents partis nationaux : leur enthousiasme a forcé la main à leurs dirigeants, poussant ces derniers à mettre de côté leurs propres visions et programmes d’avenir pour le pays, pour répondre positivement à l’appel du 1er Novembre de joindre leurs efforts autour de la tâche de lutte armée pour l’indépendance nationale. La longue cohorte de chouhada, de toutes les couches sociales et sans distinction de race ni de confession*, tombés au champ d’honneur dans les maquis, dans les geôles des tortionnaires assassins ou affrontant crânement la guillotine[13], y compris pieds-noirs, ainsi que le grand nombre d’amis français inquiétés, emprisonnés, assassinés et accusés de traîtrise à leur patrie, sont un signe qui ne trompe pas de ce retentissement.
Mais il est un témoignage important à verser à ce dossier de la nation algérienne ouvert par le 1er Novembre. C’est celui du regretté abbé Scotto[14] que nous nous excusons de citer longuement, parce que c’est un témoin autorisé pour sa place particulière dans la société pied-noir et dans l’Algérie pré- et post-indépendance, et qu’il parle avec franchise et honnêteté de la complexité de l’affaire et la façon dont il a décidé de l’affronter.
Son travail pastoral et son activité sociale l’amènent à comprendre “de plus en plus clairement l’injustice faite aux populations algériennes par le régime de colonisation : blessure de dignité, avenir barré…” Il précise :
Vers 1950 (...) a commencé à cheminer en moi l’idée que l’établissement de la justice dans ce pays passait par le droit à ce qu’on n’appelait pas encore l’autodétermination. Et cette idée s’est imposée, elle est devenue une conviction de plus en plus claire...
La guerre d’indépendance le met durement à l’épreuve. Charnel­lement lié à son peuple pied-noir, il souffre de le voir “pris à 100% » sous le charme maléfique de l’action psychologique dont “l’armée avait appris le manie­ment en Indochine”. Il s’efforce, pour le libérer de cet ensorcellement, de le convaincre, au nom de l’Evangile, qu’“une Algérie française née de l’exclusion des Algériens et de l’Algérie [est une] contradiction”. En mai 1961, après le putsch des généraux, l’archevêque Mgr Duval, a convoqué son clergé pour dénoncer ceux qui “veulent entraîner les chrétiens dans le sillage de l’"Algérie française" au nom de leur christianisme”. À ce propos, Scotto souligne : “Ce discours (...) est un très grand moment, un moment de particulière clarté.”
Les pieds-noirs sont en effet écartelés entre “l’amour de leur terre et l’amour de leur patrie”, et les évolutions entrevues à travers les résultats de l’action sociale, dans quoi Jean Scotto avoue avoir “mis peut-être un peu trop d’espoir”, ont fait long feu. Vers la fin de la guerre, Mgr Duval le charge d’une mission difficile à la tête de l’église de Maison-Carrée (El Harrach) :
Nous sommes à la veille de l’indépendance de l’Algérie, lui dit-il. Si cette église et cette paroisse ne changent pas d’allure, nos chrétiens seront terriblement malmenés. [Mais] c’est le temps de l’OAS, le temps du mépris des hommes, le temps de la débâcle qui finalement frappe irrémédiablement les pieds-noirs… [Et c’est alors] la grosse épreuve [du] départ en foule de nos paroissiens [où il voit] un certain échec de l’Eglise.
Cette tournure des choses lui fait dire qu’il est “un homme vaincu” et lui fait haïr l’OAS “parce que non seulement elle a tué des Algériens, mais parce qu’elle a tué le cœur de mon peuple pied-noir.” En tant qu’homme d’Eglise qui – contrairement à un Berenguer – n’est arrivé, et au terme d’une douloureuse évolution, qu’à la seule prise de conscience morale de l’injustice coloniale, il ne peut voir que l’OAS est la réponse logique, sinon légitime, à cette décolonisation qui remet en cause radicalement la raison d’être de ce peuple et son statut de Français sur cette terre algérienne. Les pieds-noirs se voient sacrifiés au nom d’intérêts qui ignorent les leurs propres (“leur sol, leur terre”, leurs privilèges...), et il ne leur reste désormais qu’à négocier leur place avec le peuple algérien dont sont, soudain, reconnues la justesse de sa cause et la souveraineté sur ce pays.
C’est pourquoi le père Scotto porte une blessure : alors qu’il continue de souhaiter voir pour l’Algérie “un devenir d’amitié avec la France”, il souffre que la séparation entre les deux pays se soit faite dans d’aussi mauvais termes ; que “malgré les beaux discours”, le sentiment de supériorité des Européens – “et j’en suis” – est toujours là ; que dans les journaux algériens “jamais une fleur n’est faite à la France, même quand elle a une bonne initiative ou une action valable”, et de même dans les journaux français à propos de l’Algérie ; que “la récupération de l’identité algérienne sous la forme de l’arabo-islamisme” se fait de plus en plus “avec une grande part d’agressivité” et mène à la “renonciation à ce qui était une richesse de ce pays, un certain bilinguisme et une certaine double culture”...
Cette blessure “très simplement reconnue avec une loyauté morale inséparable du loyalisme civique”, ne l’empêche pas de faire le choix d’être Algérien. Même si “changer de nationalité n’est pas un geste facile à poser. L’appartenance à un pays, même pour celui qui n’a pas un grand patriotisme affiché, touche aux fibres profondes de l’être, à ses racines.” Choix fait par “besoin de prendre la nationalité d’un pays et de gens que la majorité de ma communauté avaient tenus en mépris”, une sorte de réparation ; en plus du fait que, par sa naissance, il appartient à ce pays, et que par vocation, l’Eglise étant au service de ce pays, il éprouve le “désir d’une communion de vie” avec son peuple ; même si, découvrant petit à petit que “le peuple algérien est lui aussi travaillé par Dieu”, une certaine volonté missionnaire latente qu’il portait s’est épurée.
Dans la foulée de ce choix, et l’insuffisance de maîtrise de l’arabe lui pesant, il a voulu “une acculturation plus grande”. Il s’est même dit : “Pourquoi pas faire la prière au même moment, pourquoi pas faire le ramadan ?” Mais avec le temps, il se dit dérangé par l’apparition d’un islam “prenant un aspect plus « clérical » et s’affirmant de plus en plus massivement, de plus en plus extérieurement (...) presque agressivement.” Il avoue : “au premier appel du muezzin, je commence par l’insulter quand je suis tout seul ; puis je me dis : « je ferais mieux de dire l’angélus, il me sert de cloche ce muezzin ».”
Sans doute instruit de l’infériorisation de l’islam, malgré le nombre de ses adeptes, dans la société coloniale laïco-chrétienne, il se sent ici infériorisé dans un statut de “deuxième collège” –de “dhimmi”, un terme qui s’impose à lui comme legs idéologique de l’orientalisme occidental “militant”.[15] Et c’est ce statut que le père Scotto dit devoir assumer dans la société islamique algérienne “au nom de ma foi, en pensant à ceux qui viendront après moi ou aux autochtones qui pourraient devenir chrétiens” !
Il ne passe pourtant pas sous silence les épisodes d’heureuse communion qu’il a vécus avec les Algériens musulmans, notamment « les belles années de Belcourt » à quoi son livre consacre un chapitre. Années où, en dhimmi ? sous régime du parti unique, le FLN, dont il ne s’est jamais réclamé et qu’il a critiqué lorsqu’il a estimé nécessaire de le faire, il a été porté, en son absence, sur la liste des candidats aux municipales, en 1967, et unanimement élu ; où, en dhimmi ? il a vécu l’“atmosphère d’extraordinaire amitié (...) dans le même souci de servir la promotion des pauvres”, entouré de la sympathie des autorités civiles qui encourageaient les activités dont il était la cheville ouvrière ; où, en dhimmi ? il déclare, lors de sa consécration en 1970 comme évêque : “J’ai une reconnaissance immense envers ce pays qui m’a vu naître et dont les habitants, mieux connus et mieux aimés au fur et à mesure que le temps passe, m’ont aidé, à leur manière, à mieux vivre à la lumière de ma foi”… Ou encore le jour où, évêque en tournée dans son diocèse de Constantine, il dit à la petite communauté de religieuses, dhimmi(e)-rabaissée ? : “Mais, nom de nom, votre père c’est qui ? C’est le mozabite du coin ou c’est moi ?”, quand il s’est aperçu qu’elle “aurait déjà dû mettre la clé sous la porte sans les commerçants qui lui font crédit”…
Ce beau et douloureux témoignage fourmille d’exemples similaires montrant un homme de devoir, – tout tendu par son sacerdoce et son ardent “désir d’une communion de vie” entre les deux populations que beaucoup de choses avaient tenues séparées –, confronté à la difficulté de se saisir de ce qui peut aider à sa mission, dans cet héritage calamiteux laissé par la domination coloniale. Cette quête douloureuse pose avec justesse les vrais problèmes humains auxquels se heurte la bonne volonté des gens les plus impliqués qui cherchent un nouvel équilibre au moment des indépendances devenues incontournables. On aurait aimé voir la même démarche animer le travail de G. Meynier qui est tout tendu, lui, à trouver, au contraire, un baudet sur qui on peut crier : haro !
Laissons-le méditer sur l’aveu de Jean Scotto : “Changer de nationalité n’est pas un geste facile à poser. L’appartenance à un pays, même pour celui qui n’a pas un grand patriotisme affiché, touche aux fibres profondes de l’être, à ses racines.” !

‘Abdel ‘alim Medjaoui, février 2006

[1] Éd. Casbah, Alger, 2003, (A. Fayard, Paris, 2002) p. 682.
[2] C’est nous qui soulignons les parties marquées par un astérisque (*).
[3] Histoire intérieure du Fln, Op. cit., p. 29.
[4] Le FLN militarisé de G. Meynier, publiée dans la revue Maçâdir, éditée par le Centre national d’Études et de recherche sur le mouvement national, n° 10, spécial Révolution du1er Novembre, 2ème semestre 2004.
[5] Dans sa Lettre aux Français (Éd. Phébus, Paris, 1977, p.164), il dira métaphoriquement mais clairement que cela ne se terminera… « que par le sabre et la lutte à mort*», avec son regret que n’ait pas pu se concrétiser le projet qu’il avait proposé, en 1840, aux Français, de construire ensemble.
[6] Histoire intérieure du Fln, Op. cit., p. 91.
[7] Ce qui fait passer pour normal et conjoncturel le fait restrictif qu’ils « siégèrent moins d’un semestre à la IIème Constituante »…
[8] On l’a constaté même dans des conditions apparemment favorables, comme lorsque le gouvernement du Front populaire a déçu l’espoir que les revendications “modérées et modernes en matière de réflexion sur l’imaginaire national” du Congrès musulman pouvaient être satisfaites, puisqu’elles rejoignaient le projet gouvernemental Blum-Violette…
[9] Histoire intérieure du Fln, Op. cit., p. 249.
[10] G. Meynier ignore quasiment ce texte fondateur qu’il n’a sans doute pas jugé utile d’éplucher pour son Histoire intérieure du FLN…
[11] Cette pétition de principe pacifiste n’a pas convaincu G. Meynier qui, dans son Histoire intérieure du Fln (Op. cit., p. 679), décrit ce qu’il appelle les « nostalgiques orphelins de l’OS » comme des gens « qui brûlaient d’en découdre manu militari avec le colonialisme » !
[12] "Exigence" maladive des tenants d’un apartheid qui ne dit pas son nom, qui croient pouvoir s’en sortir avec toutes sortes de circonvolutions et de mesures de “discrimination positive”, alors qu’il leur suffit de promouvoir et de mettre en application honnêtement la citoyenneté dont ils s’enorgueillissent qu’elle constitue la base de “leur” société moderne.
[13] Et en criant : “Vive l’Algérie !” La reconnaissance officielle de la « Guerre d’Algérie » ne fait-elle pas de ces militants des prisonniers de guerre et de leur exécution par la guillotine autant d’assassinats ?
[14] Que nous tirons de son livre Curé pied-noir, évêque algérien, Paris, Desclée de Brouwer, 1991.
[15] Cet orientalisme de combat a chargé la dhimma d’un contenu historique absolument négatif. Il lui était difficile de faire oublier les drames des guerres religieuses dont les victimes (papistes en pays protestants, ou huguenots en pays catholiques) auraient été bien heureuses de profiter de la dhimma qui protégeait leurs contemporains minoritaires en pays musulmans. Il a détourné l’attention vers l'état d’inférieur et de débiteur de ces derniers envers les autorités de leurs pays, comme si les traitements définitifs que subissaient les minorités religieuses en Occident pouvaient supporter la comparaison avec un traitement inégal ! Et ne parlons pas des juifs dont l’histoire dans les pays à direction musulmane n’a jamais retenu de pogroms contre eux, à l’inverse de ceux dont sont parsemés les siècles européens, jusqu’au plus barbare, celui organisé par l’Allemagne nazie, au nom et avec l’aide, comme on l’a vu en France, des autorités judéophobes de ce pays…

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