mercredi 5 décembre 2007

L'UNEA : Cette Grande école !

L'accord sur le remaniement de la direction de l'Union nous a surtout valu que Ben Bella dénoue les cordons de sa "bourse" et nous octroie la subvention dont nous rêvions. Il convoque le directeur du Trésor et lui ordonne de donner à la délégation du CE la somme... de 70 millions. Comme ça ! sans reçu, sans rien ! Ahmed Mahi passe la nuit à la protéger en faisant du paquet son oreiller, et le lendemain nous déposons l'argent à la banque...
Le "nerf de la guerre" est enfin là. On peut développer encore plus l'activité de l'Union. Chaque département de la direction a préparé son programme de travail, et chaque responsable défini les bases de principe de son action, dans le cadre de la mise en application du programme adopté au congrès. Certains parmi nous, Mahi, Zenine, Aziz, …, mettent au point des exposés qui leur servent à des interventions pédagogiques dans des rencontres avec les étudiants sur leurs lieux de travail ou d'hébergement. Une grande masse d'étudiants sont ainsi intéressés et initiés à la compréhension des problèmes qu'ils rencontrent dans leur vie universitaire, en liaison avec ceux du pays et aux conditions de leur solution. C'est un véritable terrain d'essai pour une entreprise qui commence à se préciser et à laquelle B. Boumaaza va prêter un précieux concours. C'est la grande "école" que nous avons tôt fait de projeter pour les vacances de printemps.
Cette activité et cette mobilisation facilitent le renouvellement du Comité de la section d'Alger, dans la troisième semaine de janvier 65. Une AG regroupant une centaine d'élus étudiants élit un nouveau comité et adopte une plateforme d'action pour l'année. Le renouvellement de l'ancien CS – dont de nombreux membres (Aziz, Bachir, Djelloul, Djamal, Malek, et moi-même) avaient été promus au CE –, est presque complet : seuls Hafsi et Oulebsir sont là pour assurer une continuité. La composition du nouveau CS, renforcé par les Bensaïd, Kechiche, Kerba, Lounissi, Maoui, Medjamia, Temim, Terrah et Torche, a été dressée par le Comité des Étudiants du Parti et approuvée par le CS sortant, avant d'être proposée aux suffrages de l'AG, ainsi que le projet de plateforme et le Règlement intérieur. H. Mouffok déclare à l'issue de l'AG que c'est là « l'événement le plus important après le congrès » de l'Union. Les débats qui ont duré jusqu'au petit matin, ont été d'un niveau aussi élevé que celui du 6ème congrès, mais se sont déroulés, là, dans une grande sérénité, d'abord autour du rapport moral, présenté par Djelloul en tant que président sortant, qui a retracé toute la riche activité (politique, syndicale, culturelle et sportive) de la section pendant l'année écoulée, ensuite autour du rapport financier présenté par Hamouda, trésorier sortant, et surtout de la question de la liste des candidatures...
Ce dernier point a permis à nombre d'intervenants de présenter le mode de désignation des candidats comme l'illustration de l'accord de novembre et du soutien confiant des étudiants au Parti du FLN et à la Charte d'Alger, soutien qui faisait que leur attachement à la démocratie n'était pas contredit. Le plus éloquent, le plus convaincant de ces orateurs a été H. Mouffok, qui a su trouver les mots et lier les deux termes de la contradiction.
Je le verrai faire preuve de cette qualité faite de maîtrise et de grande capacité de convaincre lorsqu'il affrontera une salle en colère d'étudiants des cités U. que l'administration voudra déloger, alors qu'ils seront en période d'examens. On devait, faute de structures d'accueil suffisantes, préparer les chambres des cités pour recevoir les invités des deux grands rendez-vous internationaux (la Conférence afro-asiatique, et le 9ème Festival de la Jeunesse et des Étudiants ) que notre jeune pays a eu l'honneur d'être chargé d'organiser pour Juin.
Le problème a soulevé une grande émotion et l'administration a demandé à la direction de l'UNEA de l'aider à le régler en disant, pour nous aiguillonner, que le président Ben Bella était prêt à venir en personne donner un coup de main pour convaincre les étudiants si les dirigeants de l'Union ont des difficultés à le faire. J'étais avec Djelloul quand on nous fit cette demande et cette suggestion. Djelloul rétorqua : « C'est nous que vous devez convaincre que cette solution est incontournable, que ce n'est pas une solution de facilité. Si vous arrivez à le faire, ce sera alors à nous de convaincre les étudiants et pas au Président. » Le problème était réel et les solutions très peu nombreuses ; nous avons dû affronter la colère de nos camarades. C'est à H. Mouffok qu'est revenue la rude tâche. Nous étions inquiets de possibles développements non souhaitables, ou qu'au moins on ne le laissât pas parler. Mais il fallait voir comment il a pu petit à petit imposer son ascendant à la salle vociférante, puis se faire entendre et finir par capter l'attention des étudiants réunis là. Il leur dit toute l'importance de leurs examens et de leur réussite pour les besoins du pays qui attend de les voir mettre leur savoir au service de son édification. Il lia cette préoccupation à la portée de la conférence que le pays s'apprêtait à recevoir, pour leur devenir même, et leur montra que leur contribution au succès de cette rencontre internationale était de mettre les bouchées doubles pour terminer leurs révisions dans les délais qui permettraient à l'administration de préparer les cités à loger les hôtes du pays. La salle était subjuguée par ses explications et son argumentation. Puis ce fut un tonnerre d'applaudissements... C'était une fierté que d'avoir un tel chef ! (…)
La présidence du CE et le département organique s'affairent à organiser le séminaire des vacances de printemps : d'abord la logistique, en menant d'une part l'opération du choix des participants à l'"école", parmi les militants de l'Union les plus actifs et les plus liés à la masse des étudiants et à leurs problèmes. On en recense ainsi plusieurs dizaines que l'on prépare dans des briefings ou des conférences où ils font part de leurs interrogations, etc. ; d'autre part en préparant le lieu de l'"école", à savoir les moyens du Centre africain du Pétrole (salles de classe, chambres pour héberger les pensionnaires, réfectoire et cuisines et les employés de service...,) de Boumerdès, fraîchement inauguré, que le ministre de l'Économie met à notre disposition pour la circonstance. Les autres départements (syndical, volontariat, culture, sports, international...,) chacun pour ce qui concerne les affaires dont il s'occupe, préparent les textes des conférences et cours qui doivent être exposés devant les participants...
Nous avons, pour les différentes interventions, un riche matériau dans l'actualité nationale et internationale, éclairée à la lumière de la Charte d'Alger et de ses orientations de progrès, actualité dont j'ai donné un aperçu plus haut et qui continue de se déployer en ces lendemains de commémoration (la 10ème) de Novembre : la lutte pour l'unité nationale et la mise hors d'état de nuire des responsables de la dissidence ; le retour des éléments révolutionnaires (tel Rabah Bitat, mais il n'est pas le seul) à leur poste de combat ; les efforts et problèmes d'édification et de restructuration de l'économie nationale (autogestion, récupération des biens mal acquis pendant la guerre de libération...) et leurs liens avec la 2ème Conférence des pays afro-asiatiques, ainsi qu'avec les négociations pour décoloniser les relations algéro-françaises ; les avancées de la jeunesse algérienne et l'honneur qui lui est fait de préparer le premier rassemblement mondial de la jeunesse et des étudiants à se tenir hors d'Europe ; les problèmes de la décolonisation en Afrique et l'agression impérialiste contre le Congo qui, malgré les Tschombé, voulait rester fidèle au martyr Lumumba ; les problèmes de l'unité arabe, avec les échanges entre le FLN et l'USA (Union socialiste arabe - Égypte), qui fait part de l'expérience unitaire tourmentée entre les mouvements nationalistes du Proche-Orient ; et les problèmes de l'unité maghrébine, avec les suites des efforts de l'OUA pour régler le différend frontalier avec le Maroc ; etc.
Nous avons donc du pain sur la planche et nous ne sommes pas de trop pour faire face à la tâche. Je ne m'en occupe pas moins de mon inscription en 4ème année de médecine dont je suis assidûment les cours. Hélas, je ne peux prétendre, pour cette année du moins, à préparer l'internat...
(…)Cette plus grande confiance dans leur organisation donne une impulsion au travail unitaire où s'engagent nos forces communes dans la mise en œuvre du programme de l'Union, et d'abord la préparation et le déroulement du séminaire des vacances de printemps dont j'ai parlé plus haut, et qui va être enregistré comme un très grand succès : par le nombre de participantes et de participants, par l'intérêt que tous ont porté au contenu du programme d'étude et aux débats qui l'ont considérablement enrichi, par le climat convivial et, disons-le, fraternel qui a régné tout au long du séminaire... Plusieurs dizaines de jeunes universitaires de diverses spécialités, de diverses régions du pays, de divers horizons de pensée, ont vécu ensemble en une sorte d'internat, se sont connus, ont réfléchi ensemble et confronté leurs idées sur les problèmes de la décolonisation du pays et du monde que ce séminaire leur a largement fait découvrir. Des amitiés, des affinités vont se nouer... Circonstance exceptionnelle, qui va avoir des prolongements fructueux dans la préparation et la tenue du Festival de la jeunesse et des étudiants, et plus tard dans le travail et la fonction pour lesquels l'université les aura formés. Cette activité et le soutien qu'elle a trouvé auprès des cadres et enseignants universitaires qui ont contribué à l'animer, et auprès des autorités qui en ont décisivement assuré le succès, ont grandement accru le prestige de l'UNEA et renforcé son organisation…

2 commentaires:

Medjamia a dit…

Cher camarade, comme au temps que tu évoques au temps où la lumière fût à l'enfantement de l'Algérie souveraine et "socialiste" à merci. J'ai souffert pendant longtemps d'une image que je ne sais comment qualifier aujourd'hui. S'il te plaît joint moi sur mil.medj@hotmail.fr ou miloud_medjamia2002@yahoo.fr J'ai à te dire que je n'avais pas l'occasion de te dire à la mort de Hmida Horri. Mon téléphone 021904128 ou 0554557046

Medjamia a dit…

En plus, j'ai une photo de toi et moi présidant le séminaire de Boumerdès.